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De la Bigorre à Château-Thierry, quelques histoires de danses

Dernière mise à jour : 22 juin


An Immigrant’s Story, solo en corps-mémoire de la chorégraphe kenyane Wanjiru Kamuyu, le 18 mars prochain dans le cadre du festival Kidanse à Château-Thierry et alentours.


Certes, la danse est "plurielle". Qu'est-ce qui relie Solène Wachter et Wanjiru Kamuyu, chorégraphes contemporaines, le waacking de Princesse Madoki, le danseur burkinabé Issa Sanou qui intie à la danse des enfants de 6 à 10 ans à Marck (près de Calais), et la troupe d’Idyllium Cabaret qui va divertir les aînés à Beaucaire ? Nouvel épisode de la série VU D’EN FRANCES, pour prendre le pouls de la France comment qu’elle va, avec bonheurs et déboires, depuis les territoires voire terroirs, avec le concours de la presse régionale.


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A Bagnères-de-Bigorre, on n’est pas peu fier. Une enfant du pays, Solène Wachter, va danser ce vendredi soir à Montgaillard, une salle multisport. C’est un « retour aux sources », se réjouit La Nouvelle République des Pyrénées : « À peine 25 ans, et déjà sur les scènes et remarquée par les Centres Chorégraphiques Nationaux. Solène Wachter est entrée au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris à tout juste 16 ans puis a poursuivi sa formation à la prestigieuse école de danse contemporaine P.A.R.T.S de Bruxelles fondée par Anne Teresa De Keersmaeker. Cette semaine elle est de retour au pied des montagnes. »

La journaliste, Béatrice V. Garcia, a interviewé Solène Wachter : « Petites filles, avec ma sœur Aure, nous accompagnions notre maman Marie Elisabeth qui donnait des cours de jazz à l’Espace Maintenon. Quand nous avons souhaité devenir danseuses, c’est elle qui a déménagé pour nous suivre à Toulouse. Elle nous a toujours soutenus dans notre choix mais en nous prévenant que ce n’est pas un métier facile. Le hasard fait que j’ai intégré la Compagnie de Boris Charmatz, ancien directeur du Centre Chorégraphique National de Rennes et de Bretagne, là où maman dansait quand je suis née (1). Quand on part, c’est quand on revient chez les grands-parents, que l’on réalise comment c’est beau ici ! (…) La rencontre avec le public d’ici, c’est vraiment chouette, d’autant que toute une équipe venant de loin m’accompagne et qu’il me tarde de lui faire découvrir d’où je viens. »


« Au Conservatoire », poursuit Solène Wachter, « j’ai appris la technique. À Bruxelles je me suis enrichie des multiples expériences scéniques de la danse contemporaine. Le désir a émergé d’être interprète mais également auteure de mes propres projets J’y ai développé l’idée que le spectacle et la rencontre avec le public pouvaient aussi se faire en dehors des scènes et que j’avais envie d’aller vers ça. La période covid a été un moment de réflexion pendant laquelle j’ai pu m’interroger avec d’autres et élaborer ce solo. (…) Danser à Montgaillard, dans une salle non équipée, est un défi que je relève pour aller au-devant d’un public autre. Ce sera un moment unique. La danse doit être accessible à tous et partout. Je me suis intéressée à ce que pouvait voir le spectateur, en imaginant ce qu’il ne voyait pas. Je vais danser "For you/ not for you". Voilà pourquoi il y a deux gradins et sens de lecture. Tout le monde ne verra pas le même spectacle. J’ai hâte d’en discuter avec le public après. »

(1). Passionnée de danse et de musique, Marie-Elisabeth Wachter est formée au conservatoire de Tarbes puis à Paris-Sorbonne. Elle intègre très vite la compagnie jazz Dance Ensemble dirigée par Géraldine Armstrong et Wayne Barbaste. A partir de 1990, elle travaille pour différents chorégraphes tels que Miguel Lopez et Joseph Russillo. Remarquée lors du Concours International de Paris dont elle obtient le 1er prix en 1992, elle entre au Théâtre National de Rennes et de Bretagne et travaille avec le chorégraphe Gigi Caciuleanu, puis Jean-Claude Gallota. Ayant depuis toujours une attirance pour la création et l’improvisation, elle développe son propre univers par le biais notamment de spectacles de rue. En parallèle de son parcours d’interprète, elle se lance dans l’écriture chorégraphique et la mise en scène pour différentes compagnies de danse contemporaines et urbaines.

Depuis 2000, elle est régulièrement invitée par le Ballet Preljocaj pour dispenser des cours techniques aux danseurs de la compagnie à Aix-en-Provence et lors de tournées en France et à l’étranger. Forte de ces expériences, Marie-Elisabeth Wachter fonde la Cie Hors sol en 2015. Sa première création « Crimes à la carte » voit le jour en 2016. Suit « Tenir Corps », création 2017/2018. Qu’il s’agisse d’une pièce de danse-théâtre ludique, autour du célèbre jeu de société « Cluedo » ou bien d’une pièce sociétale comme « Tenir Corps » autour du harcèlement scolaire, l’écriture chorégraphique de Marie-Elisabeth est basée sur l’imaginaire. Cet imaginaire est en lien avec deux procédés chorégraphiques importants dans son travail : l’utilisation de l’objet, détourné ou pas, et le rapport au sol, où le danseur se déverse, glisse, rebondit.



Dans le Pas-de-Calais, la danse en immersion chez Cousteau

Premiers pas de danse avec Issa Sanou. Photo La Voix du Nord


Dans le Pas-de-Calais, narre la bien nommée Voix du Nord : « C’est la première fois que la troupe d’Hervé Koubi, installée à Calais, intervient à l’espace socioculturel Cousteau [à Marck]. Une vingtaine d’enfants âgés de 6 à 10 ans, sont initiés à la danse par Issa Sanou, danseur de la troupe. »

Durant toute cette semaine, une vingtaine d’enfants volontaires, de l’accueil collectif de mineurs de l’espace socioculturel Cousteau, sont initiés à la danse par Issa Sanou, de la troupe d’Hervé Koubi. « L’accueil collectif de mineurs mise sur la découverte artistique, et l’ouverture culturelle », explique Paulette Ringot directrice du centre Cousteau. « Muriel Onuffre, de la troupe, est venue nous proposer une initiation à la danse africaine. C’est ouvert à tous les enfants âgés de 6 à 10 ans mais nous avons surtout des Marckois », ajoute Maïté Meteyer, directrice de l’accueil de mineur. « Nous voulons amener la pratique de la danse, dans des centres comme celui-ci. Pendant cinq jours, les enfants vont être initiés à la danse africaine. Nous voulons développer un projet à long terme ici, si les enfants sont demandeurs », explique Muriel Onuffre, de la troupe d’Hervé Koubi.

Pour cette première séance, Issa Sanou se présente. « Je suis du Burkina Fasso, un petit pays d’Afrique de l’Ouest. Là-bas, on danse beaucoup et pour tout. Je vais vous faire découvrir ces danses. » Le temps d’un échauffement, les enfants s’approprient l’espace. L’excitation du début de séance s’estompe pour laisser place à l’application quand viennent les premiers pas. Pour ces enfants, c’est une première avec la danse… »


Si même le Burkina Faso (pays des hommes intègres) débarque chez Cousteau à Marck, près de Calais, c’est bien la preuve que le Grand Remplacement est en marche. Et Zemmour ne dit rien ???


A Château-Thierry, qui c’est Kidanse ?

Pas au tableau, chorégraphie pour salles de classe d'Ambra Senatore.


A Château-Thierry, au sud de l’Aisne, donc tout à fait en bas de l’échelle des Hauts-de-France, l’équipe de l’échangeur, Centre de développement chorégraphique, s’active à la préparation du prochain festival Kidanse, du 3 mars au 9 avril. J’aimerais bien y voir (entre autres) le spectacle de Gesiha Fontaine et Pierre Cottereau, la happy manif d’Élise Lerat et David Rolland, une fable de La Fontaine (natif de Château-Thierry, ça fait un bail) chorégraphiée par Dominique Rebaud, la pièce de classe (élémentaire) d’Ambra Senatore, et surtout surtout An Immigrant’s Story, solo en corps-mémoire de la chorégraphe kenyane Wanjiru Kamuyu (le 18 mars). Vu que je ne peux pas aller au Chili-qui-n’intéresse-presque-personne, ça devrait être possible. Mais en fait, rien n’est moins sûr. Kidanse est un « festival jeune public ». Débarquant avec ma tronche de sexagénaire, je tâcherai de convaincre que je suis resté « jeune public ». Mais c’est pas gagné…


Au menu du déjeuner-spectacle des seniors : des rires, des paillettes et de la danse

Jean-Claude, 80 ans, a improvisé quelques pas face à une danseuse de la troupe d’Idyllium Cabaret,

venue animer le déjeuner-spectacle organisé par le centre communal d’action sociale (CCAS) de Beaucaire.


Rien n’est perdu. Si on ne m’accepte pas comme « jeune public », je pourrai toujours aller en EHPAD et sans nul doute, j’aurai droit à des « animations ». Par exemple, à Beaucaire, dans le Gard, comme le rapporte Stéphanie Marin dans le magazine Objectif Gard, la troupe d’Idyllium Cabaret est venue animer le déjeuner-spectacle organisé par le centre communal d’action sociale (CCAS) : « Deux fois par an, la ville de Beaucaire et son CCAS organisent un déjeuner-spectacle dédié aux personnes de plus de 63 ans. "C’est une déclaration d’amour à tous nos aînés", a lancé le maire, Julien Sanchez, face à ses 350 convives au Casino municipal ce dimanche 13 février. Une petite douceur – une de plus puisque toutes les dames ont eu droit à une rose rouge – avant de tenter d’attendrir le public sur fond d’élections présidentielles. "Je serai beaucoup attaqué, c’est comme ça en cette période, mais on a du caractère et nous sommes motivés", s’est-il enthousiasmé, accompagné de quelques-uns de ses adjoints et de la conseillère départementale, Elisabeth Mondet. Il n’en fallait pas plus pour chauffer la salle. (…) Sur scène, Gabriel Girard, conseiller municipal et vice-président du CCAS, a salué le travail et l’engagement des aides à domicile du centre et des différentes associations dont les représentants étaient présents ce dimanche : Loisirs et partage, La Croix Rouge Française, le Secours populaire ainsi que VMEH dont sa présidente, Dolorés Baska, célébrait ses 80 ans. Une célébration accompagnée d’un tonnerre d’applaudissements comme aime à dire Drucker… Michel si tu nous lis.

D’autres claquements de mains ont retenti cette fois pour féliciter Adèle Fargier, 97 ans et Francisco Fito, 92 ans, les doyens de ce repas. Mais ils n’étaient pas les vrais doyens, enfin si, il y avait deux ex aequo… Bref l’objectif est de récompenser des personnes différentes chaque année, même si Marie Allier, 97 ans, et Savajano Antonin, 93 ans – les vrais doyens – ont tout de même eu droit à leurs cadeaux. Ces quatre grands gagnants n’ont pu cacher leur émotion, peut-être d’autant plus forte car marquée par le souvenir de ces deux dernières années. Puis, entre deux bouchées du délicieux repas concocté par les équipes du Régal Traiteur, les convives du CCAS ont découvert les belles prestations de la troupe Idyllium Cabaret. Des chants, de la danse, des strass et des paillettes… De quoi envoyer valser tous les tracas du quotidien au moins le temps d’une après-midi. Certains, comme Jean-Claude n’ont pas hésité à se lever, peu intimidé par les plumes et les fines gambettes des danseuses qui se sont invitées dans le public. À 80 ans, l’homme a assuré, provoquant un fou rire à sa table. Un peu de bonne humeur, quel bonheur ! »

Adèle Fargier, la doyenne des participants au déjeuner-spectacle à Beaucaire. Photo S.Ma/Objectif Gard

… et le doyen, Francisco Fito, 92 ans. Photo S.Ma/Objectif Gard


Le waacking élargit la danse

Passons aux choses sérieuses. A Paris, le Théâtre de la Ville, qui n’est pas encore un EHPAD, vient de dévoiler les noms des 19 finalistes de Danse élargie, qui se présenteront sur la scène de l’Espace Cardin, les Espace Cardin à Paris les 25 et 26 juin prochains. Danse élargie est un concours de danse qui ne dit pas son nom, dont l’idée initiale revient à Monsieur Boris Charmatz, récemment nommé directeur du Tanztheater de Wuppertal (ex Pina Bausch). Le communiqué affirme que le jury de Danse élargie a reçu 454 projets provenant de 63 pays : « Comme à chaque édition, ces projets célèbrent la diversité et le foisonnement des langages et des cultures : on y trouvera des démarches qui explorent l’expression du corps collectif, de la communauté et des rituels modernes, ainsi que des écritures personnelles et recherches d’auteurs très singulières. L’international sera fortement représenté avec notamment des projets portés par des artistes de Nouvelle Zélande, d’Australie, du Japon, du Burundi, d’Inde, d’Iran et de Palestine. » Formidable, non ?

Parmi les projets triés sur le volet, j’aurais bien envie d’en savoir plus sur La première danse politique du burundais Josué Mugisha. Ça tombe bien, YouTube est là :

Ah oui, il y a aussi Princesse Madoki. Elle présentera un extrait de D.I.S.C.O (Don't Initiate Social Contact with Others), « une chorégraphie 100% waacking » pour parler de la « night life ». Comme dit la chorégraphe, « c’est assez challengeant » (j’apprends des mots tous les jours), et elle a auditionné à La Villette, y compris des « remplaçants », au cas où.

Ex-collaboratrice de Sidi Larbi Cherkaoui, et de « la star internationale Beyoncé » (dans le clip tourné au Musée du Louvre Apeshit, et également dans les clips Spirit et Bigger, bande originale du film Le Roi lion), Josépha Madoki travaille aussi pour des marques telles que Lancôme (ICI), Givenchy, Gims, Undiz, Lous and the Yakuza, Sony Music, la Fondation Louis Vuitton, etc.

Avec un tel pédigrée de « danseuse plurielle » et un tel titre, D.I.S.C.O (Don't Initiate Social Contact with Others) est d’ores et déjà promis à une remarquable diffusion dans les scènes nationales et centres chorégraphiques. En revanche, Wanjiru Kamuyu, avec An Immigrant’s Story, ça n'intéresse personne. Bizarre, non ?


Danse de Saint-Guy pour finir

Danse de saint Guy, danse de la peste, danseurs fous…

Une folie dansante est apparue au fil des siècles en divers pays.


A l’ouverture du Centre National de la Danse, en 2001, son premier directeur, Michel Sala (aujourd’hui président d’honneur du Ballet de Lorraine), avait proclamé que ce futur bunker de l’entre-soi de la danse contemporaine serait « le lieu de toutes les danses ». Y ayant cru (très moyennement), je m’étais fendu d’un courrier pour proposer un atelier de danses de Saint-Guy. L’idée ne fut pas retenue. En réponse, je fus simplement et gentiment traité de « petit con ».

Aujourd’hui, vingt ans plus tard, je persiste et signe avec Goran Bregovic : « Si tu ne deviens pas fou, c’est que tu n’es pas normal ».


Jean-Marc Adolphe




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