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Photo du rédacteurTzotzil Trema

La déglingue

Dernière mise à jour : 30 mars




Statue vandalisée du colonialiste britannique Cecil Rhodes, au Rhodes Memorial du Cap, Afrique du Sud, juillet 2020.

Photo Nic Bothma / EPA.



Ça rabote par ci, ça rabote par là. Une foire à l’encan où la culture devra diminuer ses ambitions. Mais la culture n’est pas la seule à être en première ligne (de mire) des coupes budgétaires voulues par la start-up nation macronienne. L’écologie, et le tissu associatif, sont condamnés à la même disette. Vive la désagrégation sociale ?


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L’éditorial de Tzotzil Trema, agitateur clandestin


"Culture en danger". C’est un slogan qui revient périodiquement, et qui prête à croire que la culture serait une espèce en voie d’extinction, au même titre que le tigre de Sunda, le saola (également appelé "licorne asiatique") ou encore le marsouin aptère du Yangtsé.


Certes, "la culture" a de quoi se faire du mouron, en ces temps de braderie généralisée où Bercy dégaine la politique du rabot ou comme on voudra, du rabais. « Le milieu du spectacle vivant vit dans la crainte des conséquences des coupes budgétaires », écrit ainsi Guillaume Fraissard, chef du service Culture au Monde : « Pour la culture, ce sont 204 millions d’euros qui vont manquer à l’appel. Un effort qui portera en grande partie sur la création. Le Pass culture, lui, pourtant gourmand en subsides d’Etat (251 millions d’euros de budget en 2024), passe ainsi entre les gouttes, ce qui au passage ne manque pas d’agacer au regard de son efficacité contestée. » (Lire ICI)


Les milieux artistiques et culturels seraient-ils sur le point de passer à l’offensive ? Ce n’est peut-être pas pour rien que Madame Dati Rachida a choisi comme chef de cabinet, en la personne de Georges Salaün, un diplômé de Saint-Cyr et de l’École des officiers de la gendarmerie nationale, qui a d’abord fait carrière dans l'Armée de Terre puis la Gendarmerie nationale. Sous les lustres de la rue de Valois, on ne se souvient pas avoir vu un tel profil à un tel poste.


Las. Les artistes disposent de trop peu de tracteurs pour pouvoir espérer bloquer Rungis. Leur arme, c’est les tribunes et communiqués. Alerte par ci, alerte par là, Le 22 mars dernier, ils étaient plus de 3.700 "artistes et créateurs" à signer une tonitruante tribune dans Le Monde : « Quand une société perd les moyens de se comprendre et de s’imaginer avec vitalité, c’est la démocratie qui s’effondre. »


La « démocratie qui s’effondre », rien de moins ! Certes, Madame Archambault Hortense, directrice de la Maison de la culture de Seine-Saint-Denis (MC93), à Bobigny, n’a pas tort de rappeler, toujours dans Le Monde, que « comme l’ensemble des services publics, ceux de l’art et de la culture font face, depuis une dizaine d’années, à une situation de moyens stagnants, qui n’augmentent pas du tout au même niveau que l’inflation. (…) On se retrouve face à un hiatus de plus en plus criant. (…) Nous sommes pris en étau entre un besoin d’activité, un désir social très fort, et des moyens limités. Les collectivités territoriales, qui à une époque ont beaucoup subventionné la culture, ont elles aussi des problèmes, et ont gelé voire diminué leurs financements. »

 

Mais nos amis "artistes et créateurs" seraient peut-être bien inspirés de réaliser qu’ils ne sont pas seuls au monde. Et qu’à bord de la même barque à disette qui tente encore de voguer sur le cours impétueux de la start-up nation, l’ensemble des milieux associatifs sont en première ligne (de mire). Dans le plan d’économies de 10 milliards d’euros annoncé par Monsieur Le Maire Bruno, le budget jeunesse et vie associative va subir une réduction conséquente de 14.37 %, annonce ainsi le Mouvement associatif, qui ajoute :


« Par ailleurs, plusieurs baisses sectorielles pourraient avoir des effets désastreux sur les acteurs associatifs (ICI) :

Écologie, développement et mobilité durables : 2,221 milliards d’euros en moins

Travail et emploi : 1,1 milliards d’euros en moins dont près de 228 millions pris sur l’accès et le retour à l’emploi

Aide publique au développement : 742 millions d’euros en moins dont 492 millions pris sur la solidarité à l’égard des pays en développement

Cohésion des territoires : 736 millions d’euros en moins dont 300 millions pris sur l’aide au logement et près de 50 millions sur la politique de la ville

Solidarité, insertion et égalité des chances : 307 millions d’euros en moins

Immigration, asile et intégration : 174 millions d’euros en moins

Sports : 50 millions d’euros en moins

Sécurité routière : 25 millions d’euros en moins »

 

Même son de cloche (c’est Pâques) du côté du Collectif des associations citoyennes : « L’annonce des 10 milliards de coupes dans le budget 2024, par décret, sans passer par le Parlement et le débat démocratique, promet des mesures d’austérité lourdes de conséquences, anti-sociales et anti-écologiques. (…) L’écologie représente le budget le plus touché, comme le rappelle France Nature environnement. Juste derrière ce sont principalement les personnes les plus pauvres qui seront concernées par ce choix politique, pointe le Collectif Alerte. Les politiques les plus essentielles au maintien des liens sociaux, à l’accès aux droits et aux soins apparaissent également dans le viseur. »


Bref, c’est la déglingue. Une déglingue qui dézingue tout ce que la start-up nation macronienne juge non rentable, donc inutile. C’est vrai, ça. Prenons l’écologie, par exemple : même pas cotée en bourse, c’est dire !


C’est pourtant sur un site gouvernemental (du ministère du Travail et de l’Emploi) que l’on peut lire que « les associations jouent un rôle essentiel dans l’implication des citoyens pour répondre à des besoins d’utilité sociale et afin d’améliorer la qualité de vie et la solidarité des Territoires. »


Parmi les antonymes au substantif "cohésion", le Centre national de ressources textuelles et lexicales propose le mot "désagrégation". Madame Le Pen Marine et Monsieur Bardella Jordan ont à peine besoin de souffler sur les braises pour y déposer les marrons qu’ils ne vont point tarder à retirer. Monsieur Macron Emmanuel leur prépare gentiment l’âtre. Lequel Macron Emmanuel, au passage, aura bien du mal à expliquer à ses chers concitoyens que oui, il faut soutenir l’Ukraine dans son effort de guerre, quand en même temps il met la cohésion sociale à la foire à l’encan.


Tzotzil Trema


(Lire également sur les humanités la chronique de Michel Strulovici, "Quand la Macronie adhère à la secte TINA")


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