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samedi 19 février 2022

Cocktail Morozov

Portrait de Morozov par Valentin Serov (1910) devant une toile de Matisse. Mazette et tabernacle : Morozov ! Jusqu'au 3 avril, la Fondation Louis Vuitton expose la collection Morozov, un trésor accumulé par deux riches frères russes, manufacturiers du textile, férus de peinture française. Un trésor qui fût stigmatisé par Staline et traité d’art dégénéré. Cet article vous est offert par les humanités , média alter-actif. Pour persévérer, explorer, aller voir plus loin, raconter, votre soutien est très précieux. Abonnements ou souscriptions ICI .
Avec l’exposition Chtchoukine, fin 2016, début 2017, la barre avait été placée haut par la Fondation Vuitton. Pourtant, celle en cours jusqu’au 3 avril 2022, La Collection Morozov. Icônes de l’art moderne , éblouit à nouveau par la qualité des œuvres présentées, essentiellement des tableaux, si l’on excepte plusieurs sculptures d’Auguste Rodin (cf. L’Éternel printemps , 1884) et de Camille Claudel (dont la poignante par le titre comme par son sujet, L’Abandon , 1905), posées sur un piédestal presque aussi berlong [qui a la forme d'un quadrilatère plus long que large. Ex. Forme barlongue d'une salle de fête , NDLR] que la table de l’entretien entre MM. Poutine et Macron. Anne Baldassari qui avait été la commissaire générale de la manifestation Icônes de l'art moderne. La collection Chtchoukine , a réuni un ensemble d’œuvres d’artistes français et russes de la collection des frères Mikhaïl et Ivan Morozov parmi lesquels : Manet, Rodin, Monet, Pissarro, Lautrec, Renoir, Sisley, Cézanne, Gauguin, Van Gogh, Bonnard, Denis, Maillol, Matisse, Marquet, Vlaminck, Derain et Picasso aux côtés de Répine, Vroubel, Korovine, Golovine, Sérov, Larionov, Gontcharova, Malévitch, Machkov, Kontchalovski, Outkine, Sarian ou Konenkov. Naturellement, nous avons été plus sensible à certains tableaux qu’à d’autres, et à certains maîtres aussi. Parmi les plus remarquables, tous étages et artistes confondus, nous en avons apprécié plus d’une cinquantaine, soit un bon quart de ceux accrochés sur la dizaine de galeries du bâtiment de Gehry. Un célèbre animateur télé "visitant" l'exposition Morozov. C'est bizarre : il regarde l'appareil qui le photographie, pas les tableaux. Photo Nicolas Villodre. Du fils de Camille, Georges Manzana-Pissarro, nous avons repéré Paon et un nu (1907), une magnifique composition orientaliste ocre-bleu-vert et or inspiré du conte Anis al Djalis des Mille et une nuits . Un tableau aux structure et palette similaires, de Gauguin, substitue au nu une jeune Polynésienne et au paon quatre zèbres s’abreuvant. Nous n’avions pas gardé en mémoire qu’un des plus fameux portraits de Gauguin du musée des beaux-arts de Moscou, Café à Arles (1888) provenait de la collection Ivan Morozov. Ce dernier eut droit en 1910 à son portrait en assez grand format signé Valentin Sérov. Nous avons découvert un nu post-impressionniste de Charles Guérin, Le Modèle (1910) au réalisme quasi photographique. Le paysage de Maurice Denis, Plage à Perros-Guirec. La Plage verte , a gardé toute sa fraîcheur. La nature morte cézannienne de Matisse, Fruits et cafetière (1901) n’est pas une affaire de lignes mais de contraste de couleurs. Le vrai choc chromatique résultant de Fruits et bronze (1909). Par ailleurs, cette même année, Matisse s’adonne à l’autocitation, mise en abyme ou « p.i.p. » dans Nature morte à la danse . Un tableau de Malévitch sous influence cubiste, Portrait de Mikhail Matiouchine (c.1914) vaut d’être signalé. Peu d’œuvres de Picasso, ce que constatait une visiteuse, mais quelles œuvres ! L’un de ses plus célèbre, Acrobate à la boule (1905), de la période bleue et l’étonnant Portrait d’Ambroise Vollard (1910), par sa sobriété comme par sa forme non en cubes mais plutôt en éclats. Nous ne pouvons qu’admirer la technique, la composition et le savoir-faire des peintres figuratifs Piotr Kontchalovski et Ilia Machkov. Le Cézanne d’avant Cézanne (celui annonçant sa révolution formelle) est représenté par Jeune fille au piano, L’Ouverture de Tannhäuser (c.1870), portrait, si l’on peut dire, en paysage ainsi que, notamment, par sa Nature morte à la draperie (c. 1894). Un tableau très décoratif de Larionov, La Fenêtre. Tiraspol (1909) confond allègrement intérieur et extérieur. Inutile de dire que la rareté d’un Edvard Munch ( Nuit blanche. Osgarstrand. Filles sur le pont , 1903) et la qualité des Derain, Gontcharova, Louis Valtat, Corot, Sisley, Toulouse-Lautrec, Van Gogh, Monet, Manet valent le voyage-détour par le 16ème arrondissement. Nicolas Villodre VIDEOS La collection Morozov par Jérôme Cassou ( Télématin , France 2) Bande-annonce de la Fondation Louis Vuitton La saga des frères Morozov, avec Anne Baldassari, commissaire de l'exposition.

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