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Cristina Peri Rossi, écrivaine exilée, lesbienne, insoumise, reçoit le prix Cervantes.



A 80 ans, l'écrivaine uruguayenne, poétesse, romancière et nouvelliste, réfugiée à Barcelone depuis le milieu des années 1970, reçoit "le Nobel de la littérature hispanique".


Elle rejoint, entre autres, Jorge Guillén, Adolfo Bioy Casares, Augusto Roa Bastos, Ernesto Sábato, Rafael Alberti, Juan Carlos Onetti, Jorge Luis Borges, Alejo Carpentier, Francisco Umbral, Guillermo Cabrera Infante, Camilo José Cela, Mario Vargas Llosa, Octavio Paz, Carlos Fuentes…

Le prix Miguel de Cervantes, parfois surnommé le Nobel de la littérature hispanique, vient d’être attribué à l’écrivaine et poétesse uruguayenne Cristina Peri Rossi, exilée à Barcelone depuis 1972. Joli cadeau d’anniversaire pour cette écrivaine majeure, qui fête ses 80 ans ce vendredi 12 novembre 2021.


Le jury du prix Cervantes salue « l'un des grands talents littéraires d'aujourd'hui, dans une grande variété de genres, et son engagement continu sur des questions contemporaines telles que le statut des femmes et la sexualité. » Avant elle, seules six femmes avaient reçu le prix Cervantes : l'Espagnole María Zambrano (1988) -essentiellement publiée en France par José Corti-, la poétesse cubaine Dulce María Loynaz (1992) -quasiment inédite en français-, Ana María Matute (2010), la Mexicaine Elena Poniatowska (2013), et l’autre grande poétesse uruguayenne Ida Vitale (2018), publiée en France en 2016 par les éditions du Seuil.

De Cristina Peri Rossi, la France ne connaît que Le soir du dinosaure, un recueil de nouvelles publié en 1985 par Actes Sud, et L’amour sans elle (titre original : Solitario de amor), édité en 1997 par les éditions Phébus : un bref roman « à l’érotisme minutieux ».


Née à Montevideo en 1941, Cristina Peri Rossi commence à y publier ses premiers textes, Los Museos abandonados, et Indicios pánicos, à moins de30 ans.


« Silence. / Quand elle ouvre ses jambes / que tout le monde se taise. / Que personne ne chuchote /

ou vienne à moi / avec des contes ou des poèmes / ou des histoires de catastrophes / ou de cataclysmes / car il n'y a pas meilleur essaim / que ses cheveux / pas de plus grande ouverture que celle de ses jambes / aucune voûte que je regarde avec plus de respect / pas de jungle aussi parfumée que son pubis /

pas de tours ni de cathédrales plus sûres. /Silence. (…) »


Elle ne tarde pas à faire scandale en 1971 avec Evohé, un recueil de poèmes érotiques qui célèbre sans fard les amours lesbiennes. Mise au ban par le puritanisme ambiant, totalement censurée par la dictature militaire qui a dirigé l'Uruguay de 1973 à 1985 (les journaux avaient même interdiction de mentionner son nom), Cristina Peri Rossi prend le chemin de l’exil. Elle séjourne brièvement à Paris et Berlin, avant de s’installer en 1974 à Barcelone, où elle est accueillie par la poétesse Ana María Moix i Meseguer. L’exil a cependant laissé en elle la marque d’un manque, qui traverse toute son œuvre :


"Ceux d'entre nous qui savent que le manque/ est la seule chose essentielle/ rôdent dans les rues nocturnes/ de la ville/ sans chercher/ ni un mec/ ni une déesse/ ni un Dieu/

nous promenons le manque comme quelqu'un qui promène un chien".


Una pasión prohibida (Une passion interdite), 1986 ; Desastres íntimos (Désastres intimes), 1997; Estrategias del deseo (Stratégies du désir), 2004); etc. Dans ses poèmes et nouvelles, la sexualité, l’érotisme et le lesbianisme restent des sujets récurrents. Selon le critique David William Foster (mort en juin 2020), les textes de Peri Rossi affirment la nécessité pour l'individu d'assumer son identité sexuelle comme quelque chose de distinct des impositions biologiques et sociales.

Cristina Peri Rossi et Julio Cortázar, au milieu des années 1990.


Poétesse, mais aussi romancière et nouvelliste. Grande amie de Julio Cortázar, à qui elle a consacré une biographie, Cristina Peri Rossi partage avec lui un sens aigu du récit bref : une écriture à la fois poétique et sèche, alliée à une science impitoyable de la chute.


Son dernier livre, L’Insoumise (La Insumisa), a été publié par une petite maison d’édition indépendante, Palència Menoscuarto. Ce roman autobiographique retrace son enfance et sa jeunesse avec perplexité et étrangeté face au monde dans lequel elle a vécu et qu'elle ne comprend pas. Récit d’une vie en conflit permanent entre le désir et la réalité, qui cherche à réaliser ses désirs les plus profonds malgré les interdits et les coutumes sociales qui accompagnent le fait d'être une femme.


Le prix Cervantes aidera-t-il à faire mieux connaitre Cristina Peri Rossi en France ?


Nadia Mevel


Un poème pour finir, et une voix


Fidélité


Quand j'avais vingt ans, à Montevideo, j'ai écouté Mina

chantant Margherita de Cocciante

sur l'écran noir et blanc de la Rai

avec la femme que j'aimais

et j’ai été émue


Quand j'avais quarante ans, j'ai écouté Mina

chantant Margherita de Cocciante

sur le lecteur de cassettes

avec la femme que j'aimais,

à Stockholm

et j’ai été émue


A soixante ans, j'écoute Mina

chantant Margherita de Cocciante.

sur Youtube, avec la femme que j'aime,

dans la ville de Barcelone

et je suis émue.


Pourtant certains disent que je ne suis pas une personne fidèle.


Site internet Cristina Peri Rossi : http://www.cristinaperirossi.es/web/

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