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« Et l’accueil renouvelle le monde »

Dernière mise à jour : 28 mai 2022


Mimmo Lucano avec des migrants accueillis alors qu'il était maire de Riacce.


Pour avoir fait preuve de solidarité et d’hospitalité envers des migrants, Mimmo Lucano, le maire de Riace en Italie, a été condamné à 13 ans de prison. Son procès en appel vient de s’ouvrir. En France, un recueil de textes est paru en solidarité à Mimmo Lucano, et une soirée fut organisée le 26 février dernier au théâtre de l’Échangeur à Bagnolet, filmée par les humanités. L’hospitalité est un devoir d’humanité, la solidarité ne saurait être un délit. Ce week-end, à Calais, une "Fabrique d'agirs" réunit des associations mobilisées pour venir en aide aux migrants, exilés et réfugiés.


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Il a pris cher, comme on dit. Treize années de prison, et 500.000 euros de pénalités financières. Quel crime a donc commis Domenico Luciano, le maire de Riace, petite ville de Calabre, au sud de l’Italie ? Celui d’avoir accueilli des migrants, qui avaient bravé les flots de la Méditerranée où tant ont péri. Un crime d’hospitalité, en quelque sorte. A-t-il pris quelque liberté par rapport aux législations en vigueur, pour tendre la main aux détresses et leur offrir refuge ? Peut-être. Rien qui puisse justifier la lourde peine à laquelle Domenico « Mimmo » Luciano a été condamné en seconde instance, en septembre 2021. Association de malfaiteurs, fraude, détournement de fonds, faux et d'abus de pouvoir : les griefs retenus à son encontre sont délirants. Ils visent à punir, comme ce fut le cas en France avec Cédric Herrou, un « délit de solidarité ».


Le tribunal de Reggio de Calabre vient d’ouvrir le procès en appel de cette scandaleuse condamnation. Mimmo Lucano n’est pas le seul dans le viseur de la justice italienne. Avec lui, 17 autres personnes sont poursuivies, à divers titres, pour avoir mis en œuvre des projets d’accueil des migrants sur le "modèle Riace". Mais l’ancien maire de Riace est devenu, à son corps défendant, le symbole d’un acharnement judiciaire et politique contre celles et ceux qui, simplement, font preuve d’humanité. Qui ont le courage, comme l’écrit Mimmo Lucano, « d’être désobéissants à chaque fois qu’on reçoit des ordres qui humilient notre conscience ».

Ce procès en appel va durer tout le mois de juin, au moins jusqu’au 6 juillet. « Lucano a passé sa vie pour les migrants : une objectivité qui devrait peser devant les juges. Nous sommes choqués à l'idée de 13 ans de prison pour un homme qui a fait du bien », écrit Rocco Femia, rédacteur en chef de l’excellente revue Radici.



Un chœur de textes en solidarité


En France, la solidarité avec Mimmo Lucano s’est exprimée par la publication fin février d’un recueil de textes, Terre d’humanité. Un chœur pour Mimmo. Coordonné par Francis Combes et Laurent Klajnbaum, cet ouvrage co-édité par le Merle moqueur et les éditions Manifeste ! s’ouvre par une préface d’Edwy Plenel. « Renouvelant l’affrontement d’Antigone et de Créon, le maire de Riace s’est dressé contre des lois injustes qui piétinent des droits fondamentaux. Ce faisant, il sauve l’âme de l’Europe quand ses juges l’égarent dans le reniement d’elle-même », écrit notamment le directeur de Mediapart.

Ce chœur de textes en solidarité réunit une quarantaine de contributions originales (ainsi que des interventions graphiques), parmi lesquelles celles de Abdellatif Laâbi, d’Eugène Durif, d’Erri de Luca, d’Enzo Cormann, de Charles Pennequin, de François Koltès, de Claudine Galea, de Gérard Mordillat, de Moni Grégo, de Sandrine-Malika Charlemagne, etc.


Il faut tout lire, mais ici, deux fragments :


Sylvie Séma-Glissant : « Au moment de notre retirement, de l'élévation de nos barrières, la pensée d'un droit d’hospitalité, appelle à l'urgence de nouveaux lieux qui s'ouvrent.

De nos lieux d’isolation, pointent soudain ceux de la présence, du désir, de co-incidences, ici-là… L'hospitalité est un droit traversant de toute Cité, l'architecture même de sa « polis », où tout citoyen, arrivant ou autochtone, ne se constitue pas en l’unique habitacle d'une identité recluse.

L'espace traversant est déjà en nous-mêmes…

Repenser le lieu, le lieu de Nous-mêmes est notre état d'urgence… »


Alexis Bernaut :

« de ce continent qui se ferme comme un poing

sur la maladie le malheur

sur les graines de mort qu'il va semer ailleurs

dont il dédaigne la chair des fruits

De ce continent qui flétrit comme une fleur

Fanée, sur la tige de sa peur

d'un jugement dernier

De ce continent de millionnaires teints hâlés tempes grises

élaborant plans à trente ans prospectives

icebergs fats trônant sur une Terre qui brûle

de l’hybris de leur raison

Une rive une seule s'ouvre soudain comme un sourire

Et l’accueil renouvelle le monde. »


Terre d’humanité, un chœur pour Mimmo, 165 pages, 15 €, à commander sur le site des éditions Manifeste ! : https://editionsmanifeste.fr/livre/collectif-terre-dhumanite-un-choeur-pour-mimmo/


Terre d’humanité, une soirée à L’Échangeur de Bagnolet


Le 26 février dernier, au théâtre de L’Échangeur, à Bagnolet, a été organisée, à l’occasion de la parution de Terre d’humanité, une soirée de solidarité avec Mimmo Lucano, filmée par les humanités.


Intervention d’Edwy Plenel : "Se préoccuper du lointain, c'est se préoccuper de nous-même".



Intervention de la philosophe Marie-José Mondzain : "En l'honneur du premier venu"

(texte publié par les humanités : ICI)


Captation intégrale de la soirée :


A Calais, Fabrique d'agirs, du 26 au 29 mai


La violence des politiques migratoires place souvent ceux qui y font face sur deux plans distincts : celui de la sidération, celui de la réaction. Ce faisant, elle épuise les énergies, agit sur les corps et les psychismes, les langues, les lieux, les façons d’habiter, les stratégies. Cette situation appelle à questionner les formes d’engagement aux frontières. Qu’est-ce donc qu’agir ? Accueillir, soutenir, militer, résister à l’inacceptable ? Comment agir ? Dans l’urgence, pour tenter de transformer (radicalement) la société ? Avec quels effets ? Quels effets sur la frontière et sur la société, quels effets sur celles et ceux qui vivent et agissent depuis plus de 30 ans contre les mesures de fermeture et d’entrave ? Quels effets encore sur les relations que nous entretenons les un.e.s avec les autres, sur les liens entre recherche et citoyens, artistes et exilé.e.s ?

Dans la continuité des réflexions engagées lors des journées du Briançonnais Territoires et savoirs partagés en mai 2021, Fabrique d’agirs réunit à Calais, du 26 au 29 mai 2022, des acteurs exilé.e.s, de la solidarité, de la recherche, des arts engagés, de la médiation en langues. L’objectif est d’ouvrir les espaces-temps réflexifs et festifs pour engager des formes d’action ajustées, pour échanger autour des positionnements et tactiques locales, nationales ou transnationales collaboratives. Il s’agira ainsi, avec tous les acteurs et au travers de tables-rondes, d’ateliers, d’assemblées, de créations et de projections, d’imaginer des agirs-en-commun – une fabrique d’agirs.



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