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Pour sauver la planète, merci de laisser la solidarité ouverte

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Photo Evaldo Peres / AP


À Belém, la COP30 cherche son souffle : pendant que les pays riches comptent leurs milliards, le Brésil mise sur un mot ancien — mutirão — pour rappeler qu’on ne sauvera pas la planète sans entraide. Entre la mythologie du Curupira, gardien rusé des forêts, et l’expérience collective des femmes bâtisseuses du Mutirão 50, la conférence climatique prend des allures de leçon venue du Sud : face à la crise, ni miracle ni messie — seulement la force du collectif. Et aussi, pour aujourd'hui : le cimetière américain de Seringes-et-Nesles, Yannis Ritsos, et Tatou Ania, guerrière d'Ukraine.

 J-53 : DONS DÉFISCALISABLES JUSQU'AU 31/12/2025  

Compte à rebours : Il nous reste 53 jours pour espérer réunir d'ici le 31 décembre entre 3.500 € et 4.000 €, de façon a améliorer le site et son référencement et pouvoir salarier un.e premier.e journaliste, conditions exigées pour pouvoir espérer (enfin !) de possibles aides publiques en 2026. Depuis le lancement de cette campagne (le 31 octobre), onze donateurs, 980 € (hier, le compteur est resté bloqué).

Pour mémoire, nous avons fait le choix d'un site entièrement gratuit, sans publicité, qui ne dépend que de l'engagement de nos lecteurs. Jusqu'au 31/12/2025, les dons sont défiscalisables (à hauteur de 66% du montant du don). Un don de 25 € ne revient ainsi qu'à 8,50 € (17 € pour un don de 50 €, 34 € pour un don de 100 €, 85 € pour un don de 250 €). Dons ou abonnements ICI

Pour qui a déjà souscrit : franchement, on gagnerait à être davantage connus (et pas question, pour ça, de cracher au bassinet de Google). Si cette chronique vous plait (ou d'autres publications), n'hésitez pas à en offrir la lecture à vos connaissances...

Bon, c’est pas tout ça, il manque 1.300 milliards de dollars. 1.300 milliards de dollars, multipliés par 10.  Non, non, on ne parle pas des humanités, on n’en demande pas tant pour préserver un peu de biodiversité éditoriale. 1.300 milliards de dollars par an d’ici 2035, c’est ce qu’il faudrait pour répondre aux besoins croissants liés à l’adaptation au changement climatique, aux pertes et dommages, ainsi qu’à la transition énergétique dans les pays du Sud. Selon la "feuille de route de Bakou à Belém" remise mercredi dernier, à la veille du sommet climat qui a réuni une trentaine de chefs d’État, c’est un objectif tout à fait « atteignable », avec quelques outils pas si compliqués que ça : par exemple, la réforme des banques publiques de développement, l'allègement du fardeau de la dette qui pèse sur les pays en développement ou la mise en place de taxes (sur le transport aérien, les transactions financières, les cryptomonnaies ou encore les produits de luxe ou les biens militaires). Problème : les pays riches sont-ils disposés à mettre en œuvre un tel principe de « solidarité mondiale » ? C’est fort peu probable, au vu des précédentes COP.  « Si Al Gore était président de cette COP, si Jésus Christ la présidait, si Gandhi ressuscitait, ils ne parviendraient pas à obtenir des résultats suffisants ! », brocarde ainsi le journaliste Claudio Angelo, coordinateur de la politique internationale de l’Observatoire du Climat, un réseau brésilien regroupant 77 ONG engagées dans la lutte contre le changement climatique.

 

Un nouveau fonds pour lutter contre la déforestation

 

Ça ne veut pas dire qu’il n’y aura pas d’avancées. Ainsi, hier, le Brésil a annoncé le lancement du "Tropical Forest Forever Fund" ou "Tropical Forest Forever Facility" (TFFF), un fonds d'investissement mondial qui vise à protéger les forêts tropicales en créant un mécanisme financier durable qui récompense les pays tropicaux pour la conservation et la restauration de leurs forêts. Plus de 50 pays, représentant plus de 90% des forêts tropicales des pays en développement, ont déjà soutenu cette initiative, qui promet un changement de paradigme dans la finance climatique en mettant en avant le rôle clé des pays du Sud et des communautés autochtones, destinataires d'au moins 20% des fonds. Évidemment, les États-Unis n’en seront pas : rappelons-nous que pour empêcher les grands feux de forêts, Donald Trump préconisait de… couper les arbres !


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Curupira, emblème de la COP30 à Belém


Les pieds tournés vers l’arrière, pour mieux brouiller les pistes


A Belém, ville portuaire aux portes de l'Amazonie brésilienne, où a ouvert hier la COP30, tout le monde le voit mais personne n'en parle. Les lecteurs des humanités sont au parfum depuis le 12 février dernier. « Celui qui risque d’être le grand héros de la COP30 à Belém est toutefois plus inattendu », écrivions-nous alors (ICI). « Son nom ? Curupira. Signe distinctif : il a les pieds tournés vers l’arrière, pour mieux brouiller les pistes, afin d'égarer les gens qui essayent de le suivre à la trace, et surtout ceux qui nuisent à son habitat. Ce personnage de la mythologie amérindienne d’Amazonie s’apparente à un gardien vigilant de la forêt. Curupira y exerce son action protectrice en égarant chasseurs et autres intrus qui portent atteinte à son univers. Selon l'une des versions proposées par un folkloriste italo-brésilien, Ermanno Stradelli, le nom de Curupira provient de tupi "kuru'pir", de "curu" (contraction de "corumi" : enfant) et "pira" : corps, désignant ainsi "corps d'enfant". Curupira est souvent représenté comme un nain fort et agile aux cheveux roux, aux dents vertes, qui court si vite que personne ne peut l'attraper.


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Des fermiers et des bénévoles préparent des colis alimentaires dans le cadre de l'initiative "Mutirão do bem viver", visant à distribuer des aliments aux familles pauvres pendant la pandémie de Covid-19, le 2 août 2020, dans la région de Brasilia, au Brésil.

Photo Eraldo Peres / AP.


Un "mutirão mondial contre le changement climatique"


Pour donner quelques chances de réussite à cette nouvelle COP, le Brésil a une autre arme secrète, le mutirão (prononcer "mou-tchir-aho"), ou plutôt, "un mutirão mondial contre le changement climatique", selon les termes choisis en mai par le président de la COP30, le diplomate brésilien André Corrêa do Lago, dans sa toute première lettre d'intention en préparation du sommet. Issu des langues tupi-guarani, parlées par des peuples répartis entre le Brésil, le Paraguay, l'Uruguay, le nord de l'Argentine et la Bolivie, ce mot de "mutirão" désigne « une communauté qui se rassemble pour travailler à une tâche commune, qu'il s'agisse de récolter, de construire ou de s'entraider ». Dans le sud de l’État brésilien de Bahia, le peuple Tupinamba de Olivença utilise le terme "mutirão" pour désigner un « travail collectif, comme pour faire "uma roça" (défricher un terrain) ou construire une maison », explique l'anthropologue et leader autochtone Juliana Tupinamba. « En échange de ce travail collectif qui met à contribution la communauté, l'usage veut que la personne qui a sollicité de l'aide offre un repas copieux, festif, qui va permettre des réjouissances collectives », poursuit Capucine Boidin, professeure d'anthropologie à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine. « Ceux qui sont venus travailler sont récompensés par une fête, mais aussi par l'assurance de pouvoir, à leur tour, mobiliser la présence de celui qu'ils ont aidé quand ils se retrouveront face à une tâche qu'ils ne peuvent pas accomplir tout seuls », résume-t-elle : « Pour les communautés autochtones, le mutirao n'est pas simplement un coup de main qu'on donne le week-end, c'est un système. C'est le principe de base de fonctionnement du système productif et redistributif. »


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Dans le cadre du projet "Mutirão 50", à Fortaleza, des participants entreprennent un travail collectif. Photo : Yves Cabannes.


Ce modèle basé sur l'entraide, l'autogestion, le micro-urbanisme et la propriété collective des terres à Fortaleza, a vu le jour dans les années 1980 à Fortaleza, dans le nord-est du Brésil, avec la lutte pour le logement menée par un mouvement de sans-toit dans la périphérie de Fortaleza, capitale de l'État brésilien de Ceará. À cette époque, chaque mois, une nouvelle favela était créée, construite grâce à des processus d'occupation des terres.

À la fin de la décennie, l'Unité d'action communautaire (UAC) de la municipalité de Fortaleza, en collaboration avec le mouvement des sans-terre, a enregistré 550 familles dans une favela appelée Conjunto Marechal Rondon. La plupart de ses habitants avaient été expulsés de force de l'avenue Beira-Mar pendant la dictature militaire pour faire place à la construction d'hôtels et d'appartements de luxe. Beaucoup de familles déplacées, qui vivaient déjà en dessous du seuil de pauvreté, ont été confrontées à une nouvelle réalité marquée par la faim aiguë et des besoins évidents en matière de logement.


C'est dans ce contexte qu'est né en 1988 le projet Mutirão 50, grâce à la collaboration de multiples acteurs : la municipalité de Fortaleza, alors dirigée par le Parti des travailleurs (PT), qui a établi des relations étroites avec des mouvements sociaux tels que le Mouvement des sans-terre (Movimento dos Sem Terra, ou MST) local, l'UAC (qui faisait partie de la Fondation des services sociaux de la ville), le mouvement local des sans-terre, principalement les familles qu'ils avaient sélectionnées, et le Groupe de recherche et d'échange technologique (ou GRET), une ONG qui apportait une assistance technique aux mouvements sociaux.


Les ressources étaient variées : la municipalité de Fortaleza a fait don d'un hectare de terrain public ; les autorités municipales et régionales ont fourni les infrastructures de base (eau, assainissement, électricité et égouts) ; les fonds pour les matériaux de construction ont été obtenus grâce à l'aide internationale ; et la construction elle-même a été réalisée grâce à l'action collective des familles participantes, qui ont travaillé en moyenne vingt heures par semaine. L'objectif du projet allait au-delà de la construction de logements. Il s'agissait de créer « un morceau de ville », un quartier micro-urbain avec des maisons construites collectivement grâce à un processus d'entraide, selon les spécificités brésiliennes appelées mutirão. Le projet a également créé des cours arrière et avant, des petites places et des squares, des espaces publics ouverts, des petits magasins, une crèche pour aider les femmes à la recherche d'un emploi ou déjà actives, des potagers communautaires et une petite zone industrielle. Tous les bâtiments ont été construits par les résidents eux-mêmes, grâce à l'entraide.


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Les femmes ont eu un rôle moteur dans le projet "Mutirão 50". Au premier plan, Dona Margarida, future présidente du CONPOR,

et Dona Lúcia. « La joie et les rires ont fait partie intégrante du processus Mutirão 50 », commente Yves Cabannes.


À la demande des familles, en particulier des femmes, le processus de construction n'a pas commencé par les logements, comme prévu initialement. À la place, un hangar destiné aux activités productives a d'abord été construit à l'aide de matériaux disponibles localement, tels que la carnauba [un type de palmier à huile], des troncs pour la structure et des feuilles de palmier pour le toit. Les murs ont été construits avec des blocs de ciment de terre comprimée, en utilisant la terre disponible sur place.  La décision de commencer par la production de composants de construction plutôt que de construire les maisons avec des matériaux conventionnels disponibles sur le marché reflétait le désir des femmes de recevoir une formation afin de pouvoir, à un stade ultérieur, trouver un emploi et générer des revenus. Commencer par la construction de l'abri de production a permis de tester des méthodes de construction et de lancer la production de briques de terre et de ciment compressées, de rebords de fenêtres, de blocs de pierre et de ciment pour les fondations, de réservoirs d'eau individuels en ferrociment et de toilettes en ciment et en poudre de pierre (comme le montrent les photos 4 et 7). L'espace est devenu un centre de formation et d'apprentissage pour les familles et a contribué à réduire les coûts de construction, ce qui a permis aux résidents de planifier et, à terme, de construire des logements plus grands comprenant deux chambres, un salon, une salle de bain et un espace buanderie extérieur avec évier.


Au fur et à mesure que le processus avançait, les futurs résidents ont créé le Conseil populaire de Rondon (CONPOR). L'organisation était chargée d'informer les résidents, de mobiliser les familles, d'organiser le travail collectif, ainsi que d'assurer la liaison et de servir de médiateur avec le gouvernement municipal dans les situations tendues. Elle était également chargée de formuler des règles et des directives internes, avec l'aide de l'UAC. En 1989, avant de quitter ses fonctions, le gouvernement municipal a accepté de céder les terrains sous un régime collectif au CONPOR, ce qui a constitué une étape importante dans l'histoire de la lutte pour le logement au Brésil. Le micro-quartier industriel, les magasins, la crèche, les places et les rues sont devenus la propriété de CONPOR. Cette expérience présente des similitudes avec le modèle Community Land Trust (CLT), connu sous le nom de Termo Territorial Coletivo en portugais et introduit au Brésil depuis 2018. Le micro-quartier s'est également inspiré de la première cité-jardin anglaise, Letchworth, qui existe encore aujourd'hui.


Les 46 premières maisons ont été remises aux familles à la fin de l'année 1990. À ce moment-là, les familles et CONPOR ont changé le nom du lotissement "Mutirão 50" en "Residencial Nova Alvorada" (Lotissement Nouvelle Aube), qui visait à résumer symboliquement le sentiment de vivre une vie digne dans un petit quartier urbain.

Selon l'urbaniste français Yves Cabannes, qui a accompagné le projet, tout ce processus a créé un fort sentiment d'appartenance à leur nouveau quartier et des liens solides entre les résidents : « Les familles du Mutirão 50 sont restées et très peu ont vendu leur maison, ce qui diffère de ce qui s'est passé dans d'autres projets de logements d'entraide. Cela s'explique par le fait que tout l'effort était un processus collectif de production de logements sociaux, ce qui a permis aux gens de se sentir partie prenante. Le désir de rester et de ne pas vendre, malgré leur pauvreté et leurs multiples besoins, était extraordinaire. Et cela a été une leçon fondamentale que nous avons apprise. Il ne s'agissait pas seulement de la force collective ; le processus même de construction d'entraide a donné un sentiment d'appartenance ».


Décédé en janvier 2025, Yves Cabannes était un urbaniste, professeur émérite de planification du développement à l'University College London (UCL), et un militant passionné pour la justice sociale et le droit à la ville. Il a consacré plus de 45 ans à la promotion du développement urbain équitable, de la justice sociale et du droit à la ville. Spécialisé en urbanisme participatif, il a été pionnier dans les domaines des budgets participatifs, de l’agriculture urbaine, de la souveraineté alimentaire, des régimes fonciers communautaires et des systèmes alimentaires urbains locaux. Il a travaillé internationalement, notamment en Amérique latine, dans les Caraïbes, et en Asie, en liaison avec des institutions comme l’ONU-Habitat, la Banque asiatique de développement et la FAO.


  • A suivre demain : Journal de COP, avec 18 jeunes de Saint-Ouen, l'association Banlieues Climat, des étudiants de l'Université de Guyane et des représentants des Amérindiens Wayana.

Derrière des choses simples je me cache, pour que vous me trouviez ;

si vous ne me trouvez pas, vous trouverez les choses,

vous toucherez ce que ma main a touché,

les traces de nos mains se joindront l’une à l’autre.

La lune du mois d’août brille dans la cuisine

comme un pot étamé (pour la seule cause que j’ai dite)

elle éclaire la maison vide et le silence agenouillé de la maison –

le silence est toujours agenouillé.

Chaque mot est un départ

pour une rencontre – annulée souvent –

et c’est un mot vrai seulement quand, pour cette rencontre, il insiste


Yannis Ritsos, poème introductif de Parenthèses (1946-1947)


Yannis Ritsos est mort il y a 45 ans, le 11 novembre 1980. Poète grec majeur du XXe siècle, reconnu pour son engagement politique (il fut membre du Parti communiste grec) et son oeuvre profondément humaine. Sa poésie est marquée par son militantisme antifasciste, ses luttes contre les dictatures et son soutien aux opprimés, notamment pendant la guerre civile grecque et la dictature des Colonels (1967-1974).Parmi ses œuvres les plus célèbres figurent "Romiosini", "Epitaphios" et "Les Chants d’amour et de mort".

 ÉPHÉMERIDES

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Le cimetère américain de Seringes-et-Nesles.

Armistice. Le 11 novembre 1918 marque à 5h15 du matin dans un wagon-restaurant situé dans la clairière de Rethondes, en forêt de Compiègne, la signature de l’armistice mettant provisoirement fin aux combats de la Première Guerre mondiale. En ce jour d'armistice, petite visite au cimetière américain de Seringes-et-Nesles, au sud de l'Aisne, près de Fère-en-Tardenois. 15 hectares, 6 012 soldats américains tombés au combat dans cette région, notamment lors de la seconde bataille de la Marne en 1918. Tous américains, à une excption près : un soldat français inconnu enterré là par erreur. Il ya là un carré particulier (le carré E) où reposent des soldats condamnés pour actes déshonorants, dont Eddie Slovik, le seul soldat américain fusillé pour désertion pendant la Seconde Guerre mondiale, enterré ici jusqu'en 1987 avant que ses restes soient rapatriés aux États-Unis. Et sur les 6.12 soldats qui reposent là, 15 femmes : sept étaient infirmières de l'armée américaine et huit faisaient partie de la Croix-Rouge américaine, dont Mary Agnes Moore, actrice qui avait joué dans des films muets. Il a aussi un poète, Joyce Kilmer, mort à 31 ans dans la bataille de l'Ourcq. Son poème le plus connnu, Trees, avait été publié en 1913 :


Je pense que je ne verrai jamais / Un poème aussi beau qu'un arbre. / Un arbre dont la bouche affamée est pressée / Contre le doux sein de la terre ; / Un arbre qui regarde Dieu toute la journée, / Et lève ses bras feuillus pour prier ; / Un arbre qui, en été, peut porter / Un nid de rouges-gorges dans ses cheveux ; / Sur le sein duquel la neige s'est posée ; / Qui vit intimement avec la pluie. / Les poèmes sont écrits par des fous comme moi, / Mais seul Dieu peut créer un arbre.


(I think that I shall never see / A poem lovely as a tree. / A tree whose hungry mouth is prest / Against the earth’s sweet flowing breast; / A tree that looks at God all day, / And lifts her leafy arms to pray; / A tree that may in Summer wear / A nest of robins in her hair; / Upon whose bosom snow has lain; / Who intimately lives with rain. / Poems are made by fools like me, / But only God can make a tree).


Donald Trump aurait pu commémorer le 11 Novembre, mais aujourd'hui, il a golf. Il ne commémorera donc pas non plus le "Black friday". On ne parle pas de la foire à gogo des soldes à tout va, ni davantage du krach boursier en 1869, mais d'un autre "vendredi noir", le 11 novembre 1887, jour où furent pendus quatre militants anarchistes — August Spies, Albert Parsons, Adolph Fischer et George Engel — pendus à la suite des émeutes et du massacre de Haymarket Square survenu le 4 mai 1886. Ces dangereux anarchistes manifestaient alors pour la journée de huit heures de travail : de véribles ennemis de l'intérieur ! Ils ne font donc pas partie de la liste des 77 criminels que Trump a grâciés hier.


LE TOUR DU JOUR 80 MONDES


UKRAINE. "Nous sommes les femmes de la guerre".

Le temps presse et on ne voudrait pas abuser. Pour aujourd'hui, une seule étape dans notre Tour du jour en 80 mondes : en Ukraine, avec Tatou Ania, "guerrière au grand coeur" (voir ICI), qui a publié, hier sur Facebook, vifdéo et poème.



Nous sommes celles que la guerre a surprises non pas en armure, mais dans la tendresse.

Nous sommes celles qui devraient être réveillées par les rires des enfants,

et non par le grondement de l'artillerie.


Nous devrions faire des gâteaux, nous dépêcher d'aller au travail,

acheter des robes et nous maquiller les cils,

mais à la place, nous enfilons des gilets pare-balles,

nous bandons nos mains

et nous dormons là où se trouvaient autrefois nos maisons.


Nos mains devraient tenir des bébés,

mais elles tiennent maintenant des armes

ou sortent des blessés des décombres.


Nous devrions rêver de voyages,

mais nous ne rêvons que d'un lever de soleil sans explosions.

D'un silence dans lequel nous pourrons enfin pleurer,

non pas de peur, mais de soulagement.


Nos yeux ont vu la mort,

nos cœurs savent se taire quand la douleur est insupportable.

Nous sommes devenues celles que nous n'étions pas destinées à être,

mais celles que l'amour nous a obligées à devenir :

l'amour de la terre, de la vie, de ceux qu'il faut protéger.


Nous sommes les femmes de la guerre.

Avec les ongles cassés, mais pas le moral.

Avec des yeux où se mêlent douleur et feu.

Nous ne sommes pas des héroïnes par choix,

nous sommes des héroïnes par la force des choses.


Et quand le monde oubliera le prix de la liberté,

qu'il se souvienne de nos visages.

Celles qui ont choisi un abri froid plutôt qu'une maison chaleureuse,

un camouflage plutôt qu'une robe,

l'ombre d'un miroir brisé plutôt qu'un miroir.


Le calendrier des Indomptables n'est pas seulement un souvenir.

C'est la preuve que même parmi les cendres

la force féminine s'épanouit.

Silencieuse, amère, infinie.


Nous ne sommes pas nées pour la guerre,

mais nous nous battons pour que d'autres puissent naître,

rire, aimer et dormir chez elles, au chaud.


Et si le monde cherche une image de l'invincibilité,

qu'il regarde dans nos yeux.

Car en eux se trouve toute l'Ukraine.


(ttraduction Jean-Marc Adolphe pour les humanites-media.com)



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