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Quand le jazz rencontre l’histoire sanglante du Congo

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Patrice Lumumba, héros de l'indépendance du Congo, a été assassiné le 17 janvier 1961


Avec Soundtrack to a coup d’État, documentaire foisonnant qui sort en salle ce 1er octobre, Johan Grimonprez entrelace standards afro-américains et archives géopolitiques pour revisiter l’indépendance du Congo et l’assassinat de Patrice Lumumba. Entre fulgurances visuelles et excès de montage, le film révèle la toile d’ingérences internationales qui ont façonné un destin tragique.

 

Avec Soundtrack to a coup d’État, le réalisateur Johan Grimonprez signe un film remarquable juxtaposant, à un rythme d’enfer, performances de grands artistes du jazz et archives sur l’accession à l’Indépendance du Congo belge le 30 juin 1960.

 

Il s’en est fallu de peu pour que ce documentaire singulier, relevant du cinéma expérimental, truffé de documents rares, et même inédits, alternant et superposant brièvement, dans sa B.O., standards musicaux afro et afro-américains et matériaux audiovisuels géopolitiques de premier ordre, soit le chef d’œuvre escompté.


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Louis Armstrong avec son épouse Lucille Armstrong sur le plateau de Gizeh, Égypte (1961)

 

Plusieurs raisons à cela : le long, très long clip de 2h30 nous offre deux films pour le prix d’un. S’en dégage une sensation d’horreur du vide avec une playlist jazzistique perso du cinéaste qui privilégie les styles bebop et free, qui nous a semblé redondante par endroits, diachronique parfois avec l’insert de flashbacks, frustrante dans l’ensemble en raison de la brièveté des extraits (1) ; des bandes d’actualité livrées à toute berzingue, sur un tempo d’enfer, confondant vitesse et précipitation, s’annulant par manque de rythme – celui-ci étant privé de temps morts ; un certain manichéisme pour ce qui concerne le contenu du film montrant des hommes politiques comme Nikita Khrouchtchev ou Fidel Castro comme des héros positifs.

 

Naturellement, au temps de la Guerre froide, face à eux, face à Malcolm X, aux représentants des pays du sud et du panafricanisme (Kwame Nkrumah, Ahmed Sékou Touré, Modibo Keïta, Gamal Abdel Nasser…), le président des États-Unis de l’époque, le Républicain Dwight D. Eisenhower, les représentants de son administration, les tenants du maccarthysme et de la chasse aux sorcières communistes, le Secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, font piètre figure...

 

Après avoir analysé le commerce international des armes dans son film Shadow World (2016), le documentariste belge Johan Grimonprez détaille les conditions qui ont conduit ces derniers à organiser avec la CIA (et quantité de mercenaires) le coup d’État destiné à renverser – et à éliminer physiquement – le Premier ministre légitime du Congo indépendant, Patrice Lumumba, en plaçant des politiques à leur solde pour continuer à exploiter les richesses minières du pays, plus particulièrement l’uranium du Katanga.


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Le roi Baudoin lors des célébrations de l’indépendance du Congo à Léopoldville (Kinshasa), le 30 juin 1960.

Photo Central Press/Hulton Archive

 

À ce propos, l’écrivain congolais In Koli Jean Bofane, cité par Johan Grimonprez, évoque « un système mis au point entre Washington, Londres, Bruxelles et Kigali, où le Congo est devenu le fournisseur mondial de minerais stratégiques, nécessaires à toutes les guerres, y compris celles à venir dans l’espace. De la Première Guerre mondiale (caoutchouc), à la Seconde (uranium pour Hiroshima et Nagasaki), en passant par le Vietnam (cuivre pour les balles) jusqu’aux métaux rares d’aujourd’hui, la guerre se nourrit du sol congolais. »


Femmes et hommes politiques, personnalités célèbres ou moins connues, figurent dans le film : Andrée Blouin, Léonie Abo, Maya Angelou, Kwame Nkrumah, Gamal Abdel Nasser, Gaston Eyskens, Jawaharlal Nehru. Sans parler du roi Baudouin, d’Allen Dulles (le directeur de la CIA de l’époque). Les plans et les interventions publiques les concernant alternent avec les prestations d’artistes de jazz, mais aussi de mambo, de rock africain et de musique classique : Max Roach, Louis Armstrong, Duke Ellington, Dizzy Gillespie, Nina Simone, Quincy Jones, Miriam Makeba, Thelonious Monk, Grand Kalle, Ornette Colman, Charles Mingus, Eric Dolphy, François Van Campenhout, R.P O’Donnell, Central Band of the, Art Blakey, John Coltrane, Miles Davis, African Jazz, Pérez Prado, Archie Shepp, Pablo Casals.


Nicolas Villodre


(1) La B.O. du film est disponible sur le site https://open.spotify.com/playlist/6aoyA48qNtd7UlrXjDyhDM


  • Sortie en salle du film : le 1er octobre 2025


Trailer du film


 

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