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Un goût de céramiques


Setsuko Nagazawa, Sculpture, 2008. Collection particulière. Photo Jeremie Logeay. www.jeremielogeay.fr


Traditionnelle, comme dans l’art japonais du raku, ou contemporaine, la céramique s’expose doublement au Musée des Beaux-Arts de Lyon.


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"Le peintre décoratif, le mosaïste, le fenêtrier, l’ébéniste, le tapissier, le potier, le tisseur

doivent tous lutter contre la tendance de notre époque quand ils essaient de produire de la beauté

plutôt que du raffinement commercialisable, d’apporter une touche artistique à leur travail

plutôt qu’une touche mercantile."

William Morris, L’art et l’artisanat


CULTURES VIVES Au musée des Beaux-Arts de Lyon, le visiteur passe le plus souvent à côté de deux espaces un peu à l’écart du circuit de visite. Le premier était d’ailleurs resté fermé pendant plusieurs années : le Salon de la Norenchal, du nom d’une maison de campagne du XVIIIe siècle située dans les environs de Lyon. Les décors des murs en grisaille transplantés dans une salle du musée lui conféraient une ambiance néoclassique à la fois précieuse et austère. Une scénographie à trouver.

C’est chose faite et le Salon de la Norenchal revit depuis deux ans déjà (même si le musée a été fermé à la visite pour les raisons que l’on sait). Il a été aménagé pour accueillir la présentation de 200 céramiques originales provenant pour la plupart de donations de collectionneurs passionnés (voir ICI). Ainsi les anciennes porte-fenêtre sont transformées sur toute leur hauteur en vitrines dont le quadrillage rythme avec clarté la découverte d’une impressionnante collection de 96 bols à thé, dont quelques uns proviennent du Japon. Le plus ancien date du 16e siècle, moment où se déploie l’art du thé avec sa cérémonie ritualisée et son esthétique faite de dépouillement. Ces quelques chefs d’œuvre de la poterie niponne (de type raku mais aussi karatsu) sont présentés aux côtés d’une riche collection de bols créés par des céramistes européens fascinés par les méthodes traditionnelles, la spiritualité et le sens esthétique propre à la culture japonaise.

Dônyû, Aoyama/Seizan (montagne bleue), bol Raku noir (XVIIe siècle), bien culturel important du Japon. Collection Raku Museum.


Céramique contemporaine, art de l’inutile

Faisant écho à l’installation de cette collection permanente, l’exposition Par le feu, la couleur. Céramiques contemporaines elle-même est présentée dans un autre espace un peu à part dans le musée, pour l’occasion transformé en écrin noir qui habille uniformément les murs. Il accueille régulièrement des expositions-dossiers, donnant un coup de projecteur sur une thématique particulière, mettant ainsi en valeur les collections du musée.

Par le feu… la couleur, mais aussi les formes, les volumes, les effets de surface mats, brillants, rugueux, la variété des argiles utilisées : faïence, grès, porcelaine. Œuvres dépouillées ou au contraire d’aspect très chargé, volubile, débordant de lignes et de couleurs : l’écrin noir accentue leurs inspirations artistiques singulières. Créations très personnelles ou mêlant au contraire des influences nombreuses : le pop art, l’arte povera, l’art « folk » et le mouvement « funk » qui est parvenu dans les années 1970 à extraire la céramique du registre des récipients décoratifs en traitant avec humour de sujets sérieux. Une expression parfois anecdotique qu’on ne retrouve pas dans d’autres réalisations, recherchant la pureté ou l’âpreté d’une autre poésie.

Claudi Casanovas, Bloc, Vers 2000-2004. Musée des Beaux-Arts de Lyon.

Photo Martial Couderette © Lyon MBA


Avec son Cercle de verre massif fondu dans des moules réfractaires, taillé au burin en surface ou poli (1994), le céramiste verrier contemporain Bernard Dejonghe sculpte la pureté et la « non-couleur » du verre, avec des contrastes entre les surfaces brutes et polies, de cristallisations.

La Sculpture de Setsuko Nagazawa (comme deux briques accolées l’une à l’autre) est d’un grand dépouillement dans sa forme. Elle offre néanmoins une richesse chromatique en partie liée aux couleurs complémentaires du rouge de la terre à tuile d’Espagne et du gris bleuté foncé. Lors de la cuisson, la fumée dégagée par la combustion a pénétré et coloré la terre.

Les Blanques, montjoies per Odisseu, dalle de céramique en spirale du Catalan Claudi Casanovas,trouve toute sa résonance lorsqu’on apprend qu’elle s’inscrit dans des traces sur le chemin d’Ulysse dansl’Odyssée d’Homère, revisité par L’Odisseu de l’écrivain et poète Agustí Bartra (1908- 1982). Les thèmes de l’angoisse de l’exil sont présents. Image du labyrinthe aussi, ou du chemin qui ne mène nulle part dans la forêt, cette empreinte de grès blanc réalisée à partir d’impressions sur des reliefs prédécoupés de bois. Retour au dépouillement, celui de la précarité, de la simplicité du matériau, d’une fabrication des origines.


Isabelle Favre


« Par le feu la couleur. Céramiques contemporaines » au musée des Beaux-Arts de Lyon. Présentation d’une nouvelle collection permanente et exposition-atelier jusqu’au 27 février 2022.

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