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Plus malins que la faim

Dernière mise à jour : il y a 21 heures


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Le groupe Masamadre Teracas


Contrairement à ce qui fut annoncé, à la demande générale de 3 personnes et demi, nos éphémérides se poursuivent aujourd'hui, mais en version allégée. Et, quand même, en cette Journée mondiale de la lutte contre le SIDA, émaillée de quelques "citations du jour", on part en Espagne à la rencontre des musiciennes et chanteuses amateures du groupe Masamadre Trescasas, qui reprennent un répertoire de traditions populaires : « Pendant les années de famine, les mains et les tables vides, sans instruments, nos ancêtres trompaient la faim avec ces chants culinaires ».

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 LES CITATIONS DU JOUR

« La vie est chose dure qui serre de trop près, perpétuellement nous fait mal à l'âme. À sentir ses liens un moment se relâcher, on peut éprouver de clairvoyantes douceurs. » (Benjamin Crémieux)
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Critique littéraire, traducteur, romancier et résistant français, né il y a 137 ans à Narbonne dans une famille juive installée en France depuis le XIVe siècle, Benjamin Crémieux publie en 1921 son premier roman autobiographique, Le Premier de la classe, couronné par le prix Blumenthal. Collaborateur de La Nouvelle Revue française dès 1920, il intègre son comité de rédaction en 1926 sur invitation de Jean Paulhan et se spécialise dans la littérature italienne contemporaine, soutenant sa thèse à la Sorbonne en 1928 (Panorama de la littérature italienne contemporaine). Il fait découvrir Luigi Pirandello et Italo Svevo au public français par ses traductions, défend Marcel Proust précocement et publie des essais comme Inquiétude et Reconstruction (1931) ; lecteur chez Gallimard, il est aussi secrétaire général de la section française du PEN Club.​

Entré en 1941 dans le réseau Combat avec son fils Francis, il organise à Marseille un réseau de renseignements sous le pseudonyme Lamy jusqu'à son arrestation par la Gestapo en avril 1943. Déporté à Buchenwald (KLB 44160), il y meurt d'épuisement le 14 avril 1944 à 55 ans ; décoré à titre posthume de la Médaille de la Résistance avec rosette et cité au Panthéon.

« Parce qu'il y a des ténèbres, il y a de la lumière. Et ceux qui en sortent comprennent vraiment sa valeur. » / « 闇があるから光がある。そして闇から出てきた人こそ、本当に光のありがたさがわかるんだ » (Takiji Kobayashi)​

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Né il y a 122 ans, le 1er décembre 1903 à Ōdate (préfecture d'Akita) dans une famille de paysans, Takiji Kobayashi (小林 多喜二) est un écrivain japonais prolétarien, militant communiste et figure emblématique de la littérature ouvrière, mort sous la torture policière à 29 ans.​ Il publie en 1929 Le 15 mars 1928, roman sur les rafles policières contre les militants communistes, suivi de Le Propriétaire absentéiste (1930) et surtout Le Bateau-usine (1933), fresque sur l'exploitation ouvrière en mer d'Okhotsk, interdit jusqu'en 1948. Membre de la Fédération japonaise des auteurs prolétariens dès 1929, il devient son secrétaire général en 1931 et adhère au Parti communiste japonais la même année.​ Engagé dans des campagnes électorales et syndicales, il entre en clandestinité en 1932 face à la répression contre la Ligue de la culture prolétarienne ; arrêté le 20 février 1933 par la police politique Tokkō à Tsukiji (Tokyo), il meurt officiellement d'un arrêt cardiaque, mais les marques sur son corps indiquent une torture. Son œuvre, censurée jusqu'à la fin de la guerre, renaît en 1948 et inspire encore aujourd'hui, notamment via des adaptations manga et son inclusion au programme scolaire en 2008.​

« Penser est difficile. Les mots doivent le rendre aussi léger que possible. » / « Mõtlemine on raske. Sõnad peavad seda nii kergeks tegema, kuidas iial võimalik. » (Juhan Liiv)

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Décédé il y a 112 ans, le 1er décembre 1913, Juhan Liiv (1864-1913) est un poète et prosateur estonien, considéré comme l'un des plus grands de son pays, dont l'œuvre lyrique exprime la pauvreté rurale, la nature et l'identité nationale estonienne malgré une vie marquée par la maladie et l'isolement.​ Souffrant de maladies chroniques dès l'enfance, il grandit isolé, écrit de la poésie et des chroniques pour le journal Olevik, et commence une carrière de journaliste à Tallinn, Viljandi et Tartu de 1885 à 1892.​ Sa nouvelle Vari (L'Ombre, 1894) marque son succès avec un récit sombre et autobiographique sur un paysan sensible brisé par l'injustice sociale, influencé par le réalisme ; ses poèmes, ignorés de son vivant pour leur style non conventionnel, contrastent avec ses contemporains par leur lyrisme naturel et symboliste. Diagnostiqué schizophrène vers 29 ans, il vit reclus en pauvreté, soutenu par sa famille. Rencontré sans billet de train fin 1913, il est jeté dans le froid, contracte une pneumonie fatale et meurt le 1er décembre 1913 à Kavastu-Koosa ; son œuvre, éditée posthumément, imprègne l'âme estonienne avec des poèmes comme Hier j'ai vu l'Estonie, adaptés en chansons et cités dans la littérature moderne.​

« L'intelligence sort de l'action et y retourne. » (Henri Wallon)

Décédé il y a 63 ans, Henri Wallon est un psychologue, philosophe et homme politique français, pionnier de la psychologie du développement de l'enfant, connu pour sa théorie des stades alternant fonction et personne, et ses idées dialectiques influencées par Marx et Hegel. A lire : Principes de psychologie appliquée (1930), L'évolution psychologique de l'enfant (1941) et De l'acte à la pensée (1942).

« Je ne peux pas croire ce que vous dites, parce que je vois ce que vous faites. » (James Baldwin)

Décédé il y a 38 ans, le 1er décembre 1987, James Baldwin est un écrivain américain majeur, essayiste, romancier et militant des droits civiques, explorant le racisme, l'homosexualité et l'identité noire dans des œuvres semi-autobiographiques comme La Conversion (1953).​ Né le 2 août 1924 à Harlem (New York) dans une famille nombreuse, élevé par son beau-père prédicateur, il prêche dès 14 ans avant de s'en détourner pour la littérature, enchaînant petits boulots et publiant critiques et essais dans The Nation dès 1947. Conscient du racisme et de sa sexualité, il fuit les États-Unis en 1948 pour Paris à 24 ans, où il achève son premier roman.​ Auteur prolifique, il publie Notes d'un fils du pays (1955), La Chambre de Giovanni (1956) sur l'homosexualité et La Prochaine fois, le feu (1963), essai clé du mouvement des droits civiques critiquant la société blanche. Installé à Saint-Paul-de-Vence dès 1970, il y écrit Juste au-dessus de ma tête (1979) jusqu'à sa mort d'un cancer à 63 ans.​

Porte-parole des Noirs et des homosexuels, il s'adresse aux Blancs pour expliquer la "question raciale mêlée à la question sexuelle", participant aux marches avec King et Malcolm X ; le documentaire I Am Not Your Negro (2016) est tiré de ses notes inachevées (clip ci-dessous).


 MINI ÉPHÉMÉRIDE EN TRES BREF 


Ce 1er décembre, Journée mondiale de lutte contre le SIDA (symbolique ruban rouge à arborer sur soi en particulier ce jour, en soutien aux malades, soignants, accompagnateurs, chercheurs, voire en mémoire des victimes passées de la maladie). Voir ci-dessous, dans les brèves du jour.


Si l'on en était encore à lépoque du calendrier républicain, ce 1er décembre serait le jour de la cire.


En revues : il y a 101 ans, le 1er décembre 1924, paraissait le premier numéro de la revue La Révolution surréaliste dirigée par Pierre Naville et Benjamin Péret. Dans un autre registre, moins surréaliste, il y a 72 ans, le 1er décembre 1953, sortait aux États-Unis le premier numéro de Playboy, avec Marilyn Monroe en première playmate dénudée en couleurs. Le magazine pour hommes au petit lapin bunny a disparub des kiosques en mars 2020.


Indépendances. L'indépendance, ça se fête. Ce 1er décembre : restauration de l'Indépendance du Portugal (1640), jour férié national commémorant la révolte contre l'occupation espagnole après 60 ans d'union ibérique ; proclamation de la République centrafricaine le 1er décembre 1958 (indépendance formelle en 1960), avec courses de pirogues et hommages aux pionniers.


L'adieu aux armes. Il y a 87 ans, le 1er décembre 1948, le Costa Rica abolissait son armée, devenant le premier pays au monde à supprimer ses forces armées permanentes. La Constitution de 1949 (article 12) entérine l'interdiction : "L'armée en tant qu'institution permanente est proscrite". Remplacée par une Force publique civile (14 000 agents en 2025), le pays déclare sa neutralité perpétuelle en 1983. La réaffectation du budget militaire permet d'augmenter l'espérance de vie et d'augmenter très significativement le taux d'alphabétisation (aujourd'hui à 98%). A ce stade, mais il suffirait d'un caca nerveux, la situation peut évoluer d'heure en heure, Donald Trump n'envisage pas encore d'attaquer le Costa Rica.


LES BREVES DU JOUR


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2025 : où en est-on de la lutte contre le SIDA ?


En 2025, la lutte contre le SIDA subit un revers majeur depuis des décennies, malgré des avancées historiques. L'ONUSIDA (UNAIDS) alerte sur une crise de financement brutale, avec 1,3 million de nouvelles infections VIH en 2024 (contre <370.000 visés) et 630.000 décès (contre <250.000). 40,8 millions de personnes vivent avec le VIH, dont 9,2 millions sans traitement ; l'objectif 2030 d'éradiquer la menace publique s'éloigne...


Progrès historiques et innovations. La trajectoire reste positive sur le long terme : depuis 2010, les nouvelles infections ont chuté de 40% et les décès de 54%, sauvant 26 millions de vies, avec 32 millions sous antirétroviraux en 2024. Chez les enfants, le nombre de cas a reculé de 62% (120.000 infections). Les innovations ravivent l'espoir, comme la PrEP injectable lénacapavir (Yeztugo®) autorisée aux États-Unis, ou le VH-499 pour des traitements longue durée, mis en lumière lors des congrès CROI et EACS 2025. Les femmes et les filles représentent 53% des personnes vivant avec le VIH, mais 45% des nouvelles infections mondiales, dont 63% en Afrique subsaharienne.


Crise de financement et impacts. L'aide sanitaire internationale s'effondre de 30 à 40% par rapport à 2023 (OCDE), aggravée par le gel du programme PEPFAR sous l'administration Trump, creusant un déficit de 3,2 milliards de dollars (18,7 milliards disponibles contre 21,9 nécessaires). Les répercussions sont immédiates : ruptures de PrEP, chute des circoncisions volontaires médicales, et suspension des services par 60% des organisations communautaires dirigées par des femmes. Sans reprise, 3,3 millions d'infections supplémentaires sont attendues d'ici 2030 ; 5,3 millions de personnes ignorent encore leur séropositivité, avec des écarts criants chez les MSM (7,6%), les personnes trans (8,5%) et les usagers de drogues (7,1%).


Défis sociétaux et appel à l'action. La criminalisation des relations homosexuelles progresse dans plusieurs pays en 2025, alimentant stigmatisation et barrières à l'accès aux soins. L'Afrique subsaharienne supporte le fardeau : 61% des décès mondiaux, 4.000 jeunes femmes infectées chaque semaine. L'UNAIDS appelle à un sursaut politique : restaurer les financements, prioriser les communautés vulnérables et accélérer le déploiement des innovations pour inverser la courbe.


LES IMAGES DU JOUR


Les musiciennes et chanteuses de Masamadre Trescasas


«  Boulangères de pain rassis

Faim, peau, bois et vin

Le cœur de cette table

Résonne comme le mien

(…)

J'ai deux mains honnêtes

Tendres et dures à la fois

J'ai envie de chanter

De semer du romarin dans le temps

(…)

Boulangères de pain dur

Bercées dans du fil de fer

Si vous les regardez dans les yeux

On peut tromper la faim

(...)

Autour d'une table

Quand l'assiette est vide

C'est un régal pour l'âme

La chanson avec son refrain »


Extraits des Panaderas de pan duro ("Les Boulangères de pain dur"). Paroles et musique originales de El Naán



Masamadre Trescasas est un groupe intergénérationnel de musique traditionnelle originaire de Trescasas, une localité de Ségovie, terre historique des montagnardes, en Castilla y León, Espagne. Ce groupe féminin se spécialisent dans la préservation et la transmission de la musique traditionnelle dite des panaderas,  entre autres chansons transmises oralement, avec des ustensiles tels que des cuillères, des mortiers, des pilons, des bouteilles d'anis, des castagnettes, des coquillages, des carajillos, des tambourins, des hueseras et, bien sûr, avec les mains sur la table et dans la pâte, en rythme avec leur propre voix.


Leur projet est à la fois un atelier musical et un collectif qui rassemble adultes et enfants, assurant la transmission des traditions musicales au sein de la communauté. Ils participent régulièrement à des festivals et des événements culturels locaux, renforçant le lien social par le biais de la musique populaire et des danses associées.


« Autrefois, nos ancêtres chantaient pour alléger leur travail, se raconter des histoires et se consoler de leurs peines », explique aux humanités Beatriz Rojo, promotrice de l'initiative, qui, en plus d'être conseillère municipale chargée de la culture à Trescasas, est professeure de musique. « Les "Panaderas de pan duro" sont plus tristes. Le rythme des Panaderas est un jeu, une épreuve d'habileté qui naît devant une table vide. Pendant les années de véritable famine, les mains et les tables vides, sans instruments, nous trompions la faim avec ces chants tribaux et culinaires. Ainsi, nos grands-mères et nos grands-pères ont réussi à être plus malins que la faim. Ils étaient vraiment la génération de la durabilité. Ils ne jetaient rien. Ils recyclaient tout. Ils faisaient de la musique avec tout. Avec les instruments que nous avons à la maison : même avec la planche à laver. »



« Ce sont des chansons que nous ressentons. De plus, elles nous font prendre conscience que nous sommes capables de faire plus de choses que nous ne le pensons. Cela nous rend plus fortes », réfléchit María, l'une des participantes. « La prof a cru en nous dès le début. Nous sortions des répétitions avec des bleus et des ampoules aux mains. Le plus difficile est de savoir comment tenir les cuillères. Au début, ça fait mal. Les mains transpirent... », reconnaissent-elles toutes. Ce à quoi la prof répond : « Je savais que vous y arriveriez. Je savais qu'au final, ça marcherait. Même s'il n'est pas facile de dissocier le corps et la voix. C'est un travail multitâche qui demande de la concentration. Elles ne pensaient pas en être capables. » « Et maintenant, nous en voulons plus », affirment-elles (en chœur). Pour finir, Rosa exprime un souhait partagé : « Que l'on fasse plus de choses comme celle-ci, car ce sont elles qui font le peuple. »

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