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Femmes, indigènes, activistes.



Peuples autochtones, communautés indigènes : en Amérique latine, les femmes prennent une part déterminante dans un combat qui rejoint la lutte contre le changement climatique et pour la préservation de la biodiversité. Pour la première fois, des femmes des neuf pays d'Amazonie se sont réunies pour créer un programme commun visant à défendre le bassin amazonien et à dénoncer le machisme dans les espaces décisionnels, tant nationaux qu'internationaux. Et au Pérou s’est ouvert un second Sommet, qui entend peser sur les décisions des Nations Unies.


Comme annoncé sur les humanités, pour la première fois, 174 femmes originaires des neuf pays d'Amazonie se sont réunies à Tena (en Colombie, dans le département du Cundinamarca) afin de créer un programme commun pour les femmes autochtones du bassin amazonien, de partager leurs expériences et d'exposer les problèmes rencontrés par les femmes autochtones dans les pays qui composent l'Amazonie.

Ce premier Sommet des femmes autochtones a publié une lettre adressée aux directeurs et secrétaires de la Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26), qui se tient à Glasgow (Écosse) à la fin du mois, dans laquelle elles dénoncent leur exclusion : « Tant la biodiversité que les populations autochtones qui habitent l’Amazonie depuis des milliers d'années sont en grand danger. Les femmes amazoniennes continueront à être les gardiennes des jungles et des forêts de l'Amazonie. Nous sommes en première ligne du changement climatique car nous connaissons la forêt, les plantes et les médecines traditionnelles. Nous sommes les transmettrices de la coexistence harmonieuse, les protectrices de l'eau et les donneuses de vie. »

Leurs voix, cependant, ne sont pas entendues. La demande des femmes réunies à Tena est d'être incluses dans les discussions internationales sur l'Amazonie en tant que protagonistes des projets visant à atténuer la crise climatique et en tant que bénéficiaires de compensations pour les dommages causés à la nature et aux cultures amazoniennes. L'une des solutions au changement climatique (qui a été défendue principalement par le mouvement indigène au Brésil), à savoir la titularisation des terres collectives en Amazonie, a été laissée de côté dans l'accord de Paris de 2015. « Le système de financement actuel ne protège pas les forêts : il ne cherche qu'à réduire les émissions et à perpétuer le modèle socio-économique qui nous a menés là », déclarent-elles.


« Grâce au rôle clé des populations autochtones,

entre 42,8 et 59,7 millions de tonnes d'émissions de CO²

ont été évitées chaque année

au Brésil, en Colombie et en Bolivie. »


Plusieurs études récentes attestent pourtant parlent du rôle clé des populations autochtones dans la conservation. Un document de la FAO conclut ainsi que grâce à la survie des cultures indigènes et à leur gestion de la nature, entre 42,8 et 59,7 millions de tonnes d'émissions de CO² ont été évitées chaque année au Brésil, en Colombie et en Bolivie. Ces émissions combinées équivalent à retirer de la circulation entre 9 et 12,6 millions de véhicules pendant un an.

Les femmes ont également exigé d'être reconnues comme défenseures de l'Amazonie et de mettre fin à la disparition et à l'assassinat de dirigeants et de dirigeantes. Sur ce dernier point, les peuples autochtones sont constamment attaqués. Bien qu'ils ne représentent que 5 % de la population mondiale, en 2020, le nombre disproportionné d'attaques contre les peuples autochtones s'est à nouveau poursuivi, avec plus d'un tiers des assassinats de leaders environnementaux, selon le dernier rapport de Global Witness.


Août 2019 : des milliers de femmes indigènes défilent à Brasilia pour dénoncer

les «politiques génocidaires» de Jair Bolsonaro. Photo EVARISTO SA / AFP


Sonia Guajajara, une dirigeante indigène qui a rassemblé 5.000 femmes de tout le Brésil en 2019 pour demander la restitution des terres indigènes et a défilé à Brasilia contre le gouvernement de Bolsonaro, a également partagé son expérience de dirigeante criminalisée pour avoir défendu les droits des femmes amazoniennes dans son pays : « Nous marchions contre la loi dite « marco temporal », c'est-à-dire la loi qui veut limiter l'année de démarcation des territoires indigènes à partir de 1978, sans tenir compte des expulsions pendant la dictature militaire ». Pour s'être exprimée contre le gouvernement Bolsonaro, Sonia Guajajara a été convoquée par la police pour "diffamation" et a été considérée comme une «personne dangereuse pour la patrie».

« Il y a un autre projet de loi qui veut nier la démarcation de nos terres et qui ouvre un espace pour la spéculation immobilière, l'exploitation minière, et donne des prix ou des titres à ceux qui ont occupé des terres publiques, mais beaucoup d'entre elles sont des territoires indigènes envahis. Il s'agit de mesures qui mettent fin aux droits de tous les peuples autochtones. C'est pourquoi nous, les femmes, sommes en première ligne pour contester ces mesures », ajoute-t-elle.

Des femmes des six départements amazoniens de Colombie (Guaviare, Guainía, Caquetá, Vaupés, Amazonas et Putumayo) ont annoncé que le premier mouvement de femmes indigènes défenseurs de l'Amazonie colombienne était né. « Nous allons réagir aux formes de violence que nous connaissons sur notre territoire », a déclaré la délégation colombienne. Entre autres, les femmes colombiennes et le reste des représentants des 511 peuples indigènes du bassin amazonien retourneront sur leurs territoires pour exiger la parité dans les espaces de prise de décision, non seulement au niveau international, mais aussi au sein de leurs communautés.

Une chagra, en forêt amazonienne.


Selon les estimations des Nations unies, plus de 23 millions de femmes indigènes vivent en Amazonie, et pratiquement la moitié d'entre elles vivent dans les villes amazoniennes, ce qui a des effets sur l'accès à la santé, à l'éducation, à l'eau et au logement, la transmission des connaissances traditionnelles telles que la profession de sage-femme, la céramique, le tissage, la plantation et le soin de la chagra, entre autres [la chagra est un jardin communautaire, dont la valeur ne se limite pas à sa fonction de fourniture de nourriture. La relation avec les plantes cultivées est pensée en termes de relations avec les êtres humains unis par le sang ou l'affinité. Les activités associées à l'alimentation constituent un réseau de pratiques, de connaissances et de comportements dans lequel se répètent les interactions avec des êtres tels que les plantes, les animaux et les minéraux, ainsi qu'avec d'autres entités telles que les maîtres spirituels. NdT. Lire ICI (en espagnol)]

La Bolivienne Berenice Sarataya explique qu' « avec le COVID, de nombreux sages nous ont quittés et nous nous sommes retrouvés avec de nombreuses questions. Nous devons essayer de récupérer nos connaissances. Nous demandons également un protocole permanent de consultation préalable et l'inclusion des femmes dans les discussions sur le changement climatique. »

Teresita Andazú, présidente de la Fédération des Communautés Yanesha, au Pérou. Photo Mariela Jara/IPS


Teresita Andazú, du peuple Ashani, est la première femme cornesha [autorité suprême –dans l'histoire de son organisation, la Fédération des Communautés Yanesha, au Pérou. « Nous avons beaucoup de problèmes » explique-t-elle, liés à l'exploitation minière, aux monocultures, et à l’absence de titres de propriétés pour certaines de nos communautés. » (A lire sur les humanités, « Pérou : communautés indigènes contre la déforestation »)



Un second sommet des femmes autochtones à Lima, au Pérou


Parallèlement au premier Sommet des femmes autochtones en Colombie, a lieu au Pérou, jusqu’au 18 octobre, le second Sommet international des femmes d’Abya Yala, qui doit réunir un millier de femmes indigènes de toute l’Amérique latine. Ce sommet, organisé par la Fédération nationale des femmes paysannes, artisanes, indigènes, autochtones et salariées du Pérou (Fenmucarinap) et sept autres organisations indigènes régionales, va là aussi aborder les questions du changement climatique, de l’égalité des sexes et du « bien vivre ». Selon Lourdes Huanca, présidente de Fenmucarinap, « l'objectif principal (du sommet) est de lancer une alliance stratégique forte en Amérique latine pour faire respecter nos droits. » Les conclusions de ce sommet seront ensuite présentés au Forum permanent des Nations unies.


Photo de Une : Sonia Guajajara, l’une des organisatrice d’une marche qui a rassemblé 5.000 femmes indigènes de tout le Brésil, en août 2019. Photo Pablo Alberanga.


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