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A Kherson, sous couvert de "dénazification", l’instauration d’un régime fasciste.



Arrêté et désormais « porté disparu », le maire de Kherson avait courageusement décidé de rester dans sa ville et de tenir tête à l’occupation russe. Il a été "neutralisé", se vante le nouveau "vice-gouverneur" de la région, une petite frappe proche de milieux d’extrême-droite, membre d’un obscur mouvement occultiste qui se répandait voici peu en théories complotistes et antivax.


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« Porté disparu ». Tel est désormais le "statut " d’ Igor Kolykhaev, le maire de Kherson, enlevé et arrêté hier, mardi 28 juin. « Celui qui causait tant de tort au processus de dénazification a enfin été neutralisé », a déclaré Kirill Strimosov (Кирилл Стремоусов), collabo prorusse qui s’est autoproclamé vice-gouverneur de l'administration régionale de Kherson (photo en tête d'article).

Né en 1976 dans la région de Donestsk, ce Kirill Strimosov (ou, selon les traductions, Kyrylo Stremousov) a d’abord dirigé… une entreprise qui produisait des aliments pour poissons avant de s’installer à Kherson où il a fondé une "agence de presse" sur les médecines alternatives ainsi qu’un "comité d’auto-défense environnementale". Lié à des mouvements d’extrême-droite, il a été impliqué dans plusieurs altercations, dont l’une avec port d’arme. Il est adhérent du parti "social-patriotique" (prorusse) Derzhava (ce qui signifie "Pouvoir"). Il s’est présenté à deux reprises à des élections : aux législatives de 2019, il a recueilli 1,74 % des voix. Et en 2020, aux élections municipales à Kherson : 1,37 % des voix. Sinon, à la tête d’un mouvement religieux à caractère occulte et conspirationniste, il a promu pendant la pandémie des théories complotistes et antivax, accusant le gouvernement ukrainien d’avoir propagé le COVID-19 à partir de " laboratoires biologiques américains en Ukraine ", et exhortant les habitants à ne pas porter de masque et à ignorer les restrictions sanitaires…

Voilà donc le genre de zozo qui fait aujourd’hui régner "l’ordre russe" à Kherson.


Igor Kolykhaev, le maire de Kherson, arrêté par les forces d'occupation russes le 28 juin


Concernant le sort d’Igor Kolykhaev, on peut se faire du souci. Kherson a été occupée dès les premiers jours de l’invasion russe en Ukraine. Très vite, raconte Florence Aubenas dans un reportage paru ce 29 juin dans Le Monde, « les premières arrestations commencent. Noms des personnes ciblées, adresses, fonctions, tout est consigné sur des listes « établies pour la plupart avant l’invasion », explique le député Oleg Dunda. En tête, les vétérans ukrainiens du Donbass, qui combattent contre les séparatistes soutenus par Moscou depuis 2014. « Les vétérans, ils les veulent tous, jusqu’au dernier, une vengeance », dit le père de l’un d’eux. Embarqué à la mi-mars, son fils n’a jamais reparu. Viennent ensuite les gens d’influence, autorités locales, journalistes, comité de quartiers, patrons ou manifestants. Ceux qui en ont réchappé décrivent les mêmes scènes : la détention dans des caves, la mise à nu, les coups, la torture à l’électricité, les simulacres d’exécution. (…) Dans la ville, plus de six cents civils sont portés disparus. La moitié de la région a fui. »


Les méthodes sont celles des fascistes. Florence Aubenas raconte l’intimidation exercée sur un agriculteur contraint de « vendre » sa production de céréales : « Devant une grosse ferme près de Kherson, deux hommes descendent d’un 4 × 4. Ils se présentent comme de nouveaux businessmen. C’était au début du mois de juin. L’agriculteur ne les a jamais vus, mais l’arme le long de leur cuisse rend les questions superflues. Les inconnus proposent d’acheter les récoltes, blé, soja, légumes, tout. Ici, on est au pays de la terre noire, une des plus fertiles d’Europe, si riche, si grasse que les Allemands avaient le projet fou de l’exporter chez eux par trains entiers pendant la seconde guerre mondiale. Les visiteurs offrent un prix dérisoire, trois fois moins que le marché. Mais le marché n’existe plus dans l’oblast de Kherson : vendre en Ukraine, ou a fortiori à l’international, est impossible depuis l’occupation. Bien sûr, les inconnus annoncent payer en roubles : les nouvelles autorités imposent désormais la devise russe contre la hryvnia ukrainienne. Dans la tête du fermier, les pensées fusent à toute allure : « Si je refuse de vendre, ils me voleront de toute façon. » Une idée lui vient. « Et si je brûlais tout ? » Non, impossible. « Ils y verraient un affront. » Les deux autres se font plus clairs : « C’est la collaboration ou la cave. » Le fermier est un des derniers à avoir réussi à fuir. »


Après plus de trois mois d’occupation, pourtant, les Russes et leurs alliés du genre de Strimosov (le nouveau gouverneur de Kherson, Volodymyr Saldo, était pour sa part poursuivi pour des faits de corruption) peinent pourtant à contrôler la situation. Les « partisans » n’ont pas abdiqué. « Ces derniers jours », rapporte Florence Aubenas, « les actions se sont intensifiées, plus d’une quinzaine, pour celles qui sont connues en tout cas : des soldats russes mitraillés dans un restaurant, des voitures piégées contre le directeur de l’administration pénitentiaire, celui de la gare routière ou le gouverneur Saldo lui-même. Ces trois derniers en ont réchappé… »


A Kherson, premières tensions entre citoyens et Russes et analyse des armes russes

(reportage France 24, 21 juin 2022)

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