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Le pourquoi du comment de Susie Wiles, la seule à garder un pouvoir sur Trump

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Susie Wiles, avec Donald Trump. Photo Evan Vucci / AP


Tandis que Donald Trump tentait, dans un discours solennel, de renouer avec l’image d’un leader en contrôle, Susie Wiles, sa cheffe de cabinet, a pris la parole — et pris la main. Son entretien à Vanity Fair agit comme un signal : au cœur du tumulte trumpien, une bataille plus discrète se joue pour l’âme du Parti républicain.


Le discours solennel de Donald Trump à la nation, avant-hier soir, devait confirmer le retour à la stabilité d’une présidence que même ses partisans les plus fervents jugent souvent erratique. Mais c’est une autre voix, en coulisses, qui concentre désormais l’attention à Washington : celle de Susie Wiles, la cheffe de cabinet du président, dont l’entretien accordé à Vanity Fair continue de susciter des remous jusque dans les plus hautes sphères du Parti républicain.

Pour beaucoup, ses propos — mesurés, mais inhabituels dans le ton — n’ont rien d’une « bourde ». Wiles savait exactement ce qu’elle disait, et à qui elle s’adressait. C’est là tout le bilan d’une professionnelle chevronnée, rompue aux arcanes du pouvoir républicain, qui ne parle jamais sans calcul ni timing.


Une nomination politique sous haute surveillance


L’arrivée de Susie Wiles à la tête de l’équipe présidentielle, il y a un an, avait déjà surpris. Ancienne stratège du parti en Floride, elle a accompagné des figures aussi diverses que Rick Scott, Ron DeSantis et, plus récemment, Trump lui-même, dont elle a piloté la campagne de 2020 avant d’être marginalisée... puis rappelée par la direction du parti.


Ce retour en grâce n’était pas anodin. D’après plusieurs sources internes au GOP, sa nomination n’a pas été dictée par Trump, mais bel et bien imposée par les ténors républicains, désireux de placer quelqu’un de crédible à la tête de la machine exécutive. Parmi eux, Mitch McConnellKevin McCarthy et quelques conseillers influents du Congressional Leadership Fund auraient plaidé pour une figure capable de « tenir la maison » face aux imprévisibilités du président. En un mot, Susie Wiles représentait une assurance technocratique, garante d’un minimum de continuité au milieu du chaos trumpien.


« Susie ne joue pas la loyale courtisane, confie un ancien collaborateur du RNC. Elle joue la gardienne du temple constitutionnel. » Une remarque qui prend tout son sens après l’interview de Vanity Fair.


Un message codé aux modérés


Dans cet entretien, Susie Wiles a laissé filtrer plusieurs signaux. Derrière les formules de loyauté envers le président, elle décrit une administration « confrontée à de lourdes responsabilités » et évoque la nécessité de « préserver la confiance des institutions ». Autant de mots choisis qui sonnent comme un avertissement poli mais ferme à l’aile radicale du parti : le MAGA Movement n’est plus intouchable.


Le moment n’est pas anodin : alors que les démocrates engrangent victoire sur victoire, et que les midterms se profilent, nombre d’élus républicains redoutent un effondrement électoral. Leur angoisse s’accroît à mesure que Trump durcit son discours pro-russe et s’enferre dans des déclarations jugées outrancières — notamment à propos du meurtre de Bob Reiner, qu’il a qualifié d’« incident regrettable, mais mal compris ».


Dans ce climat, la sortie de Susie Wiles ressemble à une bouffée d’air rationnel : une manière de rappeler qu’il reste, au sein du parti, une génération d’élus attachés au respect de la Constitution et de l’État de droit, lassés d’être assimilés aux outrances de Mar-a-Lago.


La fracture républicaine en pleine lumière


L’entretien a d’autant plus d’écho qu’il met en relief une fracture désormais irréversible au sein du GOP. D’un côté, les « fanatiques MAGA », galvanisés par l’idée d’un Trump en croisade contre « l’État profond ». De l’autre, un camp plus discret, mais bien réel, celui des républicains institutionnalistes, préoccupés par la survie du parti dans un système démocratique qu’ils prétendent encore défendre.


Les premiers contrôlent la rue et les réseaux sociaux ; les seconds tiennent le Congrès et les principaux donateurs. Et c’est cet équilibre fragile que Susie Wiles semble vouloir préserver, en agissant non plus comme simple exécutante du président, mais comme porte-voix d’un establishment sur la défensive, bien décidé à ne pas laisser l’extrémisme idéologique avaler tout l’héritage républicain.


« Ce qu’elle a dit, Trump ne l’aurait jamais laissé dire sans y voir un intérêt », observe un analyste du Washington Post. Peut-être sans le savoir, le président a laissé sa cheffe de cabinet révéler — à travers son calme glacial — la peur panique qui traverse son propre camp : celle d’un effondrement moral, politique et électoral du Parti républicain.


Dans les semaines à venir, Susie Wiles devra prouver que sa stratégie de modération n’est pas qu’une manœuvre tactique pour sauver les apparences. Mais d’ores et déjà, un fait s’impose : dans la maison Trump, c’est elle qui tient les clefs.


Jean-Marc Adolphe

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